Conspiracy Watch | l'Observatoire du conspirationnisme
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🔴 Conspiracy News #15.2025

Publié par La Rédaction12 avril 2025,

L’actu de la semaine décryptée par Conspiracy Watch (du 05/04/2025 au 11/04/2025).

DÉRIVES SECTAIRES. Le rapport d’activité 2022-2024 de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) est accessible sur le site du ministère de l’Intérieur depuis le 8 avril. L’augmentation des dérives sectaires et des menaces qu’elles représentent a plus que doublé entre 2015 et 2024. Le nombre de signalements et demandes d'informations reçus par la Miviludes a connu une augmentation notable au cours de cette période, passant de 2160 à 4571. Le complotisme constitue une thématique importante de ces signalements. Il est souvent fondé sur la contestation systématique des « vérités officielles » et des institutions, y compris la science et la médecine, en particulier depuis la crise sanitaire. Le complotisme partage avec le séparatisme et les dérives sectaires une base de contestation des institutions. Cependant, il n'implique pas nécessairement une « emprise mentale volontairement exercée », indique le rapport qui confirme de nombreux signalements liés à des pratiques ou contenus numériques clairement complotistes. Par ailleurs, la Miviludes constate qu'une grande partie des signalements relatifs au complotisme comporte un discours antiétatique, avec des individus remettant en cause le principe d'égalité et prônant un séparatisme de fait. Des discours à tendance « paranoïaque » sont également rapportés. Le complotisme peut être une porte d'entrée vers des dérives sectaires, même si la caractérisation des infractions reste complexe. Le président de la Milviludes, Étienne Apaire, détaille dans un entretien au Figaro ces constatations : « Des discours complotistes ont vu le jour et ils sont instrumentalisés par certains pour gagner de l’argent. Formations, produits... ils multiplient les manœuvres de séduction pour pousser les gens à l’achat. Certains font même payer extrêmement cher du vide, via des stages de jeûne, qui parfois isolent les personnes en les invitant à ne plus voir leur médecin traitant. C’est une mécanique qui se ressemble, que l’on se situe dans le domaine sanitaire, religieux ou même dans le coaching. Seul le masque est différent. On a toujours une phase de séduction, puis d’isolement, et enfin de contrôle pour arriver au but espéré : l’emprise totale sur quelqu’un, qu’elle soit financière, sexuelle ou psychologique. Pour nous, ce n’est pas plus mal en termes de prévention, car cela nous permet de dire aux personnes de se méfier d’une mécanique, plutôt que d’un mouvement en particulier » (sources : Rapport de la Miviludes ; Le Figaro, 8 avril 2025).

THIERRY CASASNOVAS. Mis en examen pour des soupçons de dérives sectaires et candidat à la prochaine élection présidentielle, Thierry Casasnovas refait parler de lui. Son contrôle judiciaire lui interdit de parler de santé, sur quelque support que ce soit, dont sa chaîne YouTube à 2,7 millions d'abonnés. Une des solutions pour contourner cette sanction ? Produire de nouvelles vidéos au moyen de l'IA. Le youtubeur crudivoriste tente ainsi de se relancer avec une « nouvelle équipe ». Et l’usage de l’IA n’est pas sans conséquence sur ses activités commerciales. Celles-ci reposent sur des séjours d’une semaine organisés une fois par mois dans sa résidence des Pyrénées-Orientales et facturés entre 750 et 1 200 euros par participant. À cela s’ajoutent des abonnements à sa plateforme privée et la vente de magazines. Autant d’activités dont il faisait la promotion dans ses vidéos YouTube. La publication d’une vidéo promotionnelle et de podcasts utilisant l’IA pourrait paraître anodine, tant ces technologies se banalisent. Pourtant, l’utilisation de l’IA par un désinformateur poursuivi par la justice interpelle. La Miviludes a consacré une large partie de son dernier rapport à ce sujet. Elle s’y inquiète de « l’utilisation des algorithmes au service d’un prosélytisme grandissant. Les perspectives du développement de l’IA sont de nature à permettre une démultiplication des possibilités de manipulation et appellent à de nouvelles formes de régulation. Une attention particulière doit être portée à l’avenir en particulier aux messages élaborés à l’aide de l’IA et diffusés massivement sur les réseaux sociaux », indique le rapport. Ces contenus permettent-ils à Thierry Casasnovas de contourner légalement son contrôle judiciaire ? « Les interdictions qui pèsent contre lui sont larges et en des termes qui se veulent les plus complets possibles : il ne doit plus diffuser ou promouvoir de conseils en santé − qui sont à l’origine de sa mise en examen −, sur quelque support que ce soit », affirme Jean-Baptiste Cesbron, avocat spécialiste de l’emprise sectaire (source : L’Express, 9 avril 2025).

TAÏWAN. Et si la Chine désinformait grâce à l'IA ? Ce sont les conclusions d'un rapport du Bureau de la sécurité nationale taïwanais révélé par Reuters. Selon ce document, la Chine recourt à l’intelligence artificielle générative pour intensifier ses campagnes de désinformation contre l’île. Objectif : diviser l’opinion publique taïwanaise. Depuis le début de l’année, plus de 500 000 messages controversés ont été repérés, majoritairement sur Facebook et TikTok. Cette stratégie s’ajoute aux manœuvres militaires, sanctions économiques et opérations d’influence déjà déployées par Pékin, qui revendique la souveraineté sur Taïwan (source : Reuters, 8 avril 2025).

DÉSINFORMATION. « La désinformation est l’un des plus grands défis des démocraties » alerte le chercheur en psychologie sociale Sander van der Linden. Mais qui y est le plus vulnérable ? Une étude internationale a examiné la susceptibilité à la désinformation chez plus de 66 000 personnes dans 24 pays en utilisant le Test de Susceptibilité à la Désinformation (MIST). Elle a révélé que les individus de la Génération Z, les femmes, les non-binaires, les personnes les moins diplômées et celles qui ont des opinions politiques plus conservatrices étaient plus vulnérables à la désinformation. En outre, bien que la confiance perçue dans leur capacité à détecter la désinformation soit généralement associée à une meilleure performance, cette adéquation variait selon les groupes. Ainsi, les femmes évaluent particulièrement bien leur capacité, tandis que les conservateurs extrêmes se surestiment nettement. Paradoxalement, la Génération Z a obtenu les pires résultats au test, tout en évaluant sa propre capacité à détecter la désinformation avec la plus grande justesse. Cette étude fournit ainsi le premier profil systématique et global de la vulnérabilité à la désinformation et vient corroborer des résultats plus anciens. Selon une étude de l’Université de Cambridge publiée le 29 juin 2023, les 18-29 ans, pourtant très à l’aise avec les outils numériques, sont les plus vulnérables aux fake news. Testée sur plus de 8 000 participants et utilisée par YouGov aux États-Unis, l’enquête montrait que seuls 11 % des jeunes adultes obtiennent un score élevé au MIST, contre 36 % des plus de 65 ans. Plus le temps passé en ligne augmente, plus la capacité à distinguer le vrai du faux diminue. Les utilisateurs de Snapchat, TikTok ou Truth Social figurent parmi les plus perméables à la désinformation. Le test, basé sur 20 titres à classer comme vrais ou faux (certains générés par ChatGPT), mesure la résilience face aux contenus manipulatoires (sources : Personality and Individual Differences, 8 avril 2025 ; Université de Cambridge, juin 2023, David Colon/X, 8 avril 2025).

SOMMEIL. Gare aux insomnies ! Une étude parue dans le Journal of Health Psychology suggère que le manque de sommeil favorise les croyances conspirationnistes. Les chercheurs révèlent par ailleurs qu'une mauvaise qualité de sommeil et l'insomnie sont associées à des niveaux plus élevés de dépression, eux-mêmes liés à une augmentation des croyances complotistes. Ainsi, les mauvais dormeurs seraient plus susceptibles de croire aux thèses complotistes. La dépression serait en outre un mécanisme psychologique clé expliquant l'appétence pour les théories du complot (source : Le Point, 8 avril 2025).

IA. Reporters Sans Frontières (RSF) a annoncé avoir claqué la porte des négociations européennes sur le Code de bonnes pratiques sur l'IA faute de prise en compte des risques systémiques sur l’intégrité de l’information et de toute mesure concrète visant à protéger le droit des citoyens à une information fiable. Le directeur général de RSF, Thibaut Bruttin dénonce l'absence de la moindre « disposition concrète pour lutter contre les dangers avérés que fait courir l’IA pour l’accès à l’information fiable » et déplore que le droit à l'information ait été chassé de la troisième version du texte qui ne mentionne parmi les risques ni les deepfakes, ni la prolifération de faux sites d’information automatisés, ni les chatbots. Interrogé par Conspiracy Watch, Bruttin détaille : « Les institutions doivent se poser en garantes de la régulation démocratique de technologies qui entendent perturber durablement le journalisme. Cela devient urgent » (source : RSF, 8 avril 2025).

COMPLOTISME D'ATMOSPHÈRE. Une séquence de l’émission « C à vous » reprend quelques propos d’Éric Ciotti diffusés sur Europe 1 dans laquelle le député rapporte que « Macron a dissous l'Assemblée nationale pour masquer le déficit budgétaire ». La réaction de la Ministre des comptes publics Amélie de Montchalin, invitée sur le plateau de l’émission, a été immédiate : « C'est une théorie du complot qui n'est pas à la hauteur ni de la situation des finances publiques, ni à la hauteur de ce qu'est notre démocratie en France. La dérive des finances publiques vient de la maladie endémique de la France : l'endettement. Et surtout, on a un nombre de crises devant nous. Aujourd'hui, on peut peut-être s'épargner les théories du complot, la désinformation » (source : C à vous/X, 8 avril 2025).

CLIMAT. Le Monde revient sur la désinformation climatique qui prospère dans une partie des médias audiovisuels français. Négation de la crise climatique ou de son origine humaine, fausses informations sur les énergies renouvelables et les véhicules électriques… La désinformation climatique n’est plus l’apanage des réseaux sociaux mais se « normalise » également dans une partie des médias audiovisuels français. C’est la conclusion principale d’une étude inédite publiée le 10 avril par Data for Good, QuotaClimat et Science Feedback, trois organisations non gouvernementales (ONG) spécialisées dans l’analyse du traitement médiatique des enjeux écologiques. Ces associations ont recensé et analysé 128 cas de désinformation climatique au cours du premier trimestre 2025, soit une dizaine par semaine, en passant au crible les programmes d’information des dix-huit principales chaînes de télévision et de radio, à l’aide d’une intelligence artificielle. Il s’agit d’affirmations « non étayées », « scientifiquement contredites », « manipulatrices par omission » ou « fondées sur des théories invalidées », précise le rapport. Sud Radio – qui représente à lui seul 31 % des cas de désinformation climatique – est le média le plus concerné, suivi par CNews, LCI, RMC, BFM TV et Europe 1. Plus largement, 77 % des séquences d’informations fausses ou trompeuses émanent de médias privés. Davantage encore que le constat scientifique, deux sujets sont particulièrement propices aux « intox » : l’énergie et la mobilité. Ces campagnes de désinformation  risquent de s’amplifier encore tandis que les politiques de transition climatique et énergétique sont devenues l’un des boucs émissaires des populismes et que le climatoscepticisme progresse (source : Le Monde, 10 avril 2025).

RASSEMBLEMENT NATIONAL. Malgré les affirmations du parti, ils n’étaient pas 10 000 mais certainement moins de 7 000 à venir manifester le 6 avril pour soutenir Marine Le Pen après sa condamnation pour détournements de fonds publics. Les élus et les militants du RN n’ont cessé de mobiliser leurs électeurs, entretenant le récit d’un complot contre leur cheffe de file et dénonçant une « décision politique ». Intox et complotisme se sont invités à la manifestation parisienne, certains déclarant : « C’est le garde des sceaux qui a donné ses ordres au procureur ! ». Du côté de leur appui, notons par exemple André Bercoff qui écrit : « La séquence Marine Le Pen démontre que l’État profond, malmené aux USA, renforce ses quartiers à Bruxelles et entreprend, par politiciens et juges interposés, la dissolution vaselinée des peuples sous Ursula von der Leyen. Aidé en cela par l’amateurisme d’une opposition décérébrée » [archive] ou encore Dieudonné [archive]. Du côté de l’international, l’ancienne présidente du RN a reçu de nombreux soutiens parmi lesquels ceux d’Elon Musk, de Donald Trump [archive], d’Alex Jones [archive], de l’eurodéputé autrichien Harald Vilimsky (FPÖ) et du Néerlandais Geert Wilders qui accuse les institutions françaises d’agir comme une « république bananière ».

Comme le souligne Christian Salmon dans une tribune de Libération, la conception narrative de la vérité du RN demeure la clé de la condamnation de Marine Le Pen qui n’a cessé de nier ou d’accabler la justice, l’accusant de différents griefs dont certains reprennent la trame complotiste. Dans le délibéré de 152 pages, un reproche est passé inaperçu : le système de défense choisi par les accusés visait à substituer à l’approche judiciaire des faits incriminés, un récit politique visant à dénier au tribunal la capacité d’établir la vérité (sources : Tristan Mendès France/X, 6 avril 2025 ; Random Debunk/X, 6 avril 2025 ; Libération, 6 avril 2025 ; Le Monde, 6 avril 2025 ; Huffpost, 6 avril 2025 ; Le Dauphiné Libéré, 6 avril 2025).

« GRAND REMPLACEMENT ». Au micro de Louis Sarkozy, Bruno Retailleau a affirmé que « l'extrême gauche » avait un « projet de créolisation » visant à « l'effacement de notre civilisation » : « Il y a un projet clairement assumé, qui est le projet de l'extrême gauche française […] pour la créolisation. Ce qu'ils veulent, dans une stratégie de désordre, de chaos, c'est l'effacement de ce que nous sommes, de notre civilisation. C'est clairement leur projet » [archive]. Interrogé sur CNews par Erik Tegnėr, le directeur du mensuel d'extrême droite Frontières, Laurent Wauquiez, le concurrent de Bruno Retailleau pour la présidence du parti Les Républicains, a déclaré quant à lui qu'il ne considérait pas l'expression « Grand Remplacement » comme une théorie conspirationniste mais comme une « réalité démographique » [archive] (sources : Conspiracy Watch/Bluesky, TF1, 3 avril 2025).

ILIADE. Le 12e colloque de l’Institut Iliade s’est tenu le 5 avril à la Maison de la Chimie. Plus d’un millier de radicaux ont répondu à l’appel. On pouvait y voir notamment Daniel Conversano, les membres du groupe identitaire Némésis, Pierre Gentillet, candidat RN dans le Cher lors des dernières législatives et cofondateur de la Cocarde ou encore l’éditrice de l’influenceur Papacito (source : Libération, 8 avril 2025).

DIEUDONNÉ. « Trop de gens l’ont enterré trop vite ». Tantôt invité d’un podcast après ses « excuses » à la communauté juive, tantôt victorieux face aux préfets interdisant ses spectacles... le comédien et polémiste Dieudonné M'Bala M'Bala ne cesse d’utiliser l’arme de la provocation, du complotisme et de l'antisémitisme [archive] (source : L’Express, 6 avril 2025). Sur son compte X (230 000 abonnés), il annonce début mars qu’il est « encore là ! Pour combien de temps je sais pas… Mais j’ai decidé d’envoyer la purée ! Rendez-vous en tournée partout en France. Il veulent la guerre ?! C’est parti ! » [archive].

LAURA LOOMER. Plusieurs membres du Conseil de la sécurité nationale ont été évincés après une réunion le 2 avril entre Donald Trump et Laura Loomer (1,6 million d’abonnés sur X). Donald Trump nie avoir agi sur ses recommandations tout en la qualifiant de « grande patriote » et saluant ses interventions qu’il juge généralement constructives. Laura Loomer a précisé avoir présenté ses « recherches » au président et avoir insisté sur « la nécessité de sélectionner de manière très rigoureuse » les membres de son équipe. Bannie de divers réseaux sociaux et de PayPal en février 2019, l’influenceuse déverse fausses informations, propos complotistes et racistes. Elle a entre autres affirmé que les attentats du 11-Septembre relevaient d’un « complot interne »... (sources : 20 Minutes, 4 avril 2025 ; Le Nouvel Observateur, 4 avril 2025).

RUSSELL BRAND. De comédien star à influenceur complotiste. Le Britannique, révélé par la chaîne américaine MTV et extrêmement suivi sur les réseaux, est visé par de multiples accusations de viols et d’agressions sexuelles. Ce soutien de Donald Trump aime donner des conseils conjugaux tout en prônant des théories du complot. Dans ses vidéos aux millions de vues diffusées sur les réseaux sociaux, il dénonce les atteintes aux libertés au nom du Covid-19, les médias traditionnels et les politiques. Il entretient une amitié de longue date avec le complotiste radical David Icke (source : Le Temps, 5 avril 2025).

VENEZUELA. « Opération sous faux drapeaux ». Le 6 avril, l’armée vénézuélienne s’est déclarée en « état d’alerte » après la dénonciation d’un complot présumé projetant l'attaque du groupe pétrolier américain ExxonMobil au Guyana pour en faire porter la responsabilité au gouvernement du président vénézuélien Nicolás Maduro. Les forces armées vénézuéliennes ont affirmé dimanche leur « volonté de fer » de « répondre par des actions énergiques » à « toute menace pesant sur l’intégrité et la paix » de leur pays. Ces déclarations font écho à celles de la vice-présidente vénézuélienne Delcy Rodríguez qui avait mis en garde la veille contre « une opération sous faux drapeau prévue pour attaquer la plateforme d’ExxonMobil » au large de l’Essequibo, afin de l’attribuer au Venezuela et « provoquer de la confusion et générer une escalade de l’agression » (source : Ouest-France, 7 avril 2025).

AFRIQUE. Une rumeur sur les voleurs de sexe qui circule depuis des décennies en Afrique a servi de matrice à une fake news. Un article publié par le site malien Bamada.net insinue que des vols de sexe seraient orchestrés par l’État français afin de pallier la baisse de la fécondité et restaurer la virilité en berne de sa population masculine, allant jusqu’à mettre personnellement en cause un diplomate de l’ambassade de France en Centrafrique. Et, derrière lui, Emmanuel Macron... (source : La Vie des idées, 8 avril 2025).

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DÉRIVES SECTAIRES. Le rapport d’activité 2022-2024 de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) est accessible sur le site du ministère de l’Intérieur depuis le 8 avril. L’augmentation des dérives sectaires et des menaces qu’elles représentent a plus que doublé entre 2015 et 2024. Le nombre de signalements et demandes d'informations reçus par la Miviludes a connu une augmentation notable au cours de cette période, passant de 2160 à 4571. Le complotisme constitue une thématique importante de ces signalements. Il est souvent fondé sur la contestation systématique des « vérités officielles » et des institutions, y compris la science et la médecine, en particulier depuis la crise sanitaire. Le complotisme partage avec le séparatisme et les dérives sectaires une base de contestation des institutions. Cependant, il n'implique pas nécessairement une « emprise mentale volontairement exercée », indique le rapport qui confirme de nombreux signalements liés à des pratiques ou contenus numériques clairement complotistes. Par ailleurs, la Miviludes constate qu'une grande partie des signalements relatifs au complotisme comporte un discours antiétatique, avec des individus remettant en cause le principe d'égalité et prônant un séparatisme de fait. Des discours à tendance « paranoïaque » sont également rapportés. Le complotisme peut être une porte d'entrée vers des dérives sectaires, même si la caractérisation des infractions reste complexe. Le président de la Milviludes, Étienne Apaire, détaille dans un entretien au Figaro ces constatations : « Des discours complotistes ont vu le jour et ils sont instrumentalisés par certains pour gagner de l’argent. Formations, produits... ils multiplient les manœuvres de séduction pour pousser les gens à l’achat. Certains font même payer extrêmement cher du vide, via des stages de jeûne, qui parfois isolent les personnes en les invitant à ne plus voir leur médecin traitant. C’est une mécanique qui se ressemble, que l’on se situe dans le domaine sanitaire, religieux ou même dans le coaching. Seul le masque est différent. On a toujours une phase de séduction, puis d’isolement, et enfin de contrôle pour arriver au but espéré : l’emprise totale sur quelqu’un, qu’elle soit financière, sexuelle ou psychologique. Pour nous, ce n’est pas plus mal en termes de prévention, car cela nous permet de dire aux personnes de se méfier d’une mécanique, plutôt que d’un mouvement en particulier » (sources : Rapport de la Miviludes ; Le Figaro, 8 avril 2025).

THIERRY CASASNOVAS. Mis en examen pour des soupçons de dérives sectaires et candidat à la prochaine élection présidentielle, Thierry Casasnovas refait parler de lui. Son contrôle judiciaire lui interdit de parler de santé, sur quelque support que ce soit, dont sa chaîne YouTube à 2,7 millions d'abonnés. Une des solutions pour contourner cette sanction ? Produire de nouvelles vidéos au moyen de l'IA. Le youtubeur crudivoriste tente ainsi de se relancer avec une « nouvelle équipe ». Et l’usage de l’IA n’est pas sans conséquence sur ses activités commerciales. Celles-ci reposent sur des séjours d’une semaine organisés une fois par mois dans sa résidence des Pyrénées-Orientales et facturés entre 750 et 1 200 euros par participant. À cela s’ajoutent des abonnements à sa plateforme privée et la vente de magazines. Autant d’activités dont il faisait la promotion dans ses vidéos YouTube. La publication d’une vidéo promotionnelle et de podcasts utilisant l’IA pourrait paraître anodine, tant ces technologies se banalisent. Pourtant, l’utilisation de l’IA par un désinformateur poursuivi par la justice interpelle. La Miviludes a consacré une large partie de son dernier rapport à ce sujet. Elle s’y inquiète de « l’utilisation des algorithmes au service d’un prosélytisme grandissant. Les perspectives du développement de l’IA sont de nature à permettre une démultiplication des possibilités de manipulation et appellent à de nouvelles formes de régulation. Une attention particulière doit être portée à l’avenir en particulier aux messages élaborés à l’aide de l’IA et diffusés massivement sur les réseaux sociaux », indique le rapport. Ces contenus permettent-ils à Thierry Casasnovas de contourner légalement son contrôle judiciaire ? « Les interdictions qui pèsent contre lui sont larges et en des termes qui se veulent les plus complets possibles : il ne doit plus diffuser ou promouvoir de conseils en santé − qui sont à l’origine de sa mise en examen −, sur quelque support que ce soit », affirme Jean-Baptiste Cesbron, avocat spécialiste de l’emprise sectaire (source : L’Express, 9 avril 2025).

TAÏWAN. Et si la Chine désinformait grâce à l'IA ? Ce sont les conclusions d'un rapport du Bureau de la sécurité nationale taïwanais révélé par Reuters. Selon ce document, la Chine recourt à l’intelligence artificielle générative pour intensifier ses campagnes de désinformation contre l’île. Objectif : diviser l’opinion publique taïwanaise. Depuis le début de l’année, plus de 500 000 messages controversés ont été repérés, majoritairement sur Facebook et TikTok. Cette stratégie s’ajoute aux manœuvres militaires, sanctions économiques et opérations d’influence déjà déployées par Pékin, qui revendique la souveraineté sur Taïwan (source : Reuters, 8 avril 2025).

DÉSINFORMATION. « La désinformation est l’un des plus grands défis des démocraties » alerte le chercheur en psychologie sociale Sander van der Linden. Mais qui y est le plus vulnérable ? Une étude internationale a examiné la susceptibilité à la désinformation chez plus de 66 000 personnes dans 24 pays en utilisant le Test de Susceptibilité à la Désinformation (MIST). Elle a révélé que les individus de la Génération Z, les femmes, les non-binaires, les personnes les moins diplômées et celles qui ont des opinions politiques plus conservatrices étaient plus vulnérables à la désinformation. En outre, bien que la confiance perçue dans leur capacité à détecter la désinformation soit généralement associée à une meilleure performance, cette adéquation variait selon les groupes. Ainsi, les femmes évaluent particulièrement bien leur capacité, tandis que les conservateurs extrêmes se surestiment nettement. Paradoxalement, la Génération Z a obtenu les pires résultats au test, tout en évaluant sa propre capacité à détecter la désinformation avec la plus grande justesse. Cette étude fournit ainsi le premier profil systématique et global de la vulnérabilité à la désinformation et vient corroborer des résultats plus anciens. Selon une étude de l’Université de Cambridge publiée le 29 juin 2023, les 18-29 ans, pourtant très à l’aise avec les outils numériques, sont les plus vulnérables aux fake news. Testée sur plus de 8 000 participants et utilisée par YouGov aux États-Unis, l’enquête montrait que seuls 11 % des jeunes adultes obtiennent un score élevé au MIST, contre 36 % des plus de 65 ans. Plus le temps passé en ligne augmente, plus la capacité à distinguer le vrai du faux diminue. Les utilisateurs de Snapchat, TikTok ou Truth Social figurent parmi les plus perméables à la désinformation. Le test, basé sur 20 titres à classer comme vrais ou faux (certains générés par ChatGPT), mesure la résilience face aux contenus manipulatoires (sources : Personality and Individual Differences, 8 avril 2025 ; Université de Cambridge, juin 2023, David Colon/X, 8 avril 2025).

SOMMEIL. Gare aux insomnies ! Une étude parue dans le Journal of Health Psychology suggère que le manque de sommeil favorise les croyances conspirationnistes. Les chercheurs révèlent par ailleurs qu'une mauvaise qualité de sommeil et l'insomnie sont associées à des niveaux plus élevés de dépression, eux-mêmes liés à une augmentation des croyances complotistes. Ainsi, les mauvais dormeurs seraient plus susceptibles de croire aux thèses complotistes. La dépression serait en outre un mécanisme psychologique clé expliquant l'appétence pour les théories du complot (source : Le Point, 8 avril 2025).

IA. Reporters Sans Frontières (RSF) a annoncé avoir claqué la porte des négociations européennes sur le Code de bonnes pratiques sur l'IA faute de prise en compte des risques systémiques sur l’intégrité de l’information et de toute mesure concrète visant à protéger le droit des citoyens à une information fiable. Le directeur général de RSF, Thibaut Bruttin dénonce l'absence de la moindre « disposition concrète pour lutter contre les dangers avérés que fait courir l’IA pour l’accès à l’information fiable » et déplore que le droit à l'information ait été chassé de la troisième version du texte qui ne mentionne parmi les risques ni les deepfakes, ni la prolifération de faux sites d’information automatisés, ni les chatbots. Interrogé par Conspiracy Watch, Bruttin détaille : « Les institutions doivent se poser en garantes de la régulation démocratique de technologies qui entendent perturber durablement le journalisme. Cela devient urgent » (source : RSF, 8 avril 2025).

COMPLOTISME D'ATMOSPHÈRE. Une séquence de l’émission « C à vous » reprend quelques propos d’Éric Ciotti diffusés sur Europe 1 dans laquelle le député rapporte que « Macron a dissous l'Assemblée nationale pour masquer le déficit budgétaire ». La réaction de la Ministre des comptes publics Amélie de Montchalin, invitée sur le plateau de l’émission, a été immédiate : « C'est une théorie du complot qui n'est pas à la hauteur ni de la situation des finances publiques, ni à la hauteur de ce qu'est notre démocratie en France. La dérive des finances publiques vient de la maladie endémique de la France : l'endettement. Et surtout, on a un nombre de crises devant nous. Aujourd'hui, on peut peut-être s'épargner les théories du complot, la désinformation » (source : C à vous/X, 8 avril 2025).

CLIMAT. Le Monde revient sur la désinformation climatique qui prospère dans une partie des médias audiovisuels français. Négation de la crise climatique ou de son origine humaine, fausses informations sur les énergies renouvelables et les véhicules électriques… La désinformation climatique n’est plus l’apanage des réseaux sociaux mais se « normalise » également dans une partie des médias audiovisuels français. C’est la conclusion principale d’une étude inédite publiée le 10 avril par Data for Good, QuotaClimat et Science Feedback, trois organisations non gouvernementales (ONG) spécialisées dans l’analyse du traitement médiatique des enjeux écologiques. Ces associations ont recensé et analysé 128 cas de désinformation climatique au cours du premier trimestre 2025, soit une dizaine par semaine, en passant au crible les programmes d’information des dix-huit principales chaînes de télévision et de radio, à l’aide d’une intelligence artificielle. Il s’agit d’affirmations « non étayées », « scientifiquement contredites », « manipulatrices par omission » ou « fondées sur des théories invalidées », précise le rapport. Sud Radio – qui représente à lui seul 31 % des cas de désinformation climatique – est le média le plus concerné, suivi par CNews, LCI, RMC, BFM TV et Europe 1. Plus largement, 77 % des séquences d’informations fausses ou trompeuses émanent de médias privés. Davantage encore que le constat scientifique, deux sujets sont particulièrement propices aux « intox » : l’énergie et la mobilité. Ces campagnes de désinformation  risquent de s’amplifier encore tandis que les politiques de transition climatique et énergétique sont devenues l’un des boucs émissaires des populismes et que le climatoscepticisme progresse (source : Le Monde, 10 avril 2025).

RASSEMBLEMENT NATIONAL. Malgré les affirmations du parti, ils n’étaient pas 10 000 mais certainement moins de 7 000 à venir manifester le 6 avril pour soutenir Marine Le Pen après sa condamnation pour détournements de fonds publics. Les élus et les militants du RN n’ont cessé de mobiliser leurs électeurs, entretenant le récit d’un complot contre leur cheffe de file et dénonçant une « décision politique ». Intox et complotisme se sont invités à la manifestation parisienne, certains déclarant : « C’est le garde des sceaux qui a donné ses ordres au procureur ! ». Du côté de leur appui, notons par exemple André Bercoff qui écrit : « La séquence Marine Le Pen démontre que l’État profond, malmené aux USA, renforce ses quartiers à Bruxelles et entreprend, par politiciens et juges interposés, la dissolution vaselinée des peuples sous Ursula von der Leyen. Aidé en cela par l’amateurisme d’une opposition décérébrée » [archive] ou encore Dieudonné [archive]. Du côté de l’international, l’ancienne présidente du RN a reçu de nombreux soutiens parmi lesquels ceux d’Elon Musk, de Donald Trump [archive], d’Alex Jones [archive], de l’eurodéputé autrichien Harald Vilimsky (FPÖ) et du Néerlandais Geert Wilders qui accuse les institutions françaises d’agir comme une « république bananière ».

Comme le souligne Christian Salmon dans une tribune de Libération, la conception narrative de la vérité du RN demeure la clé de la condamnation de Marine Le Pen qui n’a cessé de nier ou d’accabler la justice, l’accusant de différents griefs dont certains reprennent la trame complotiste. Dans le délibéré de 152 pages, un reproche est passé inaperçu : le système de défense choisi par les accusés visait à substituer à l’approche judiciaire des faits incriminés, un récit politique visant à dénier au tribunal la capacité d’établir la vérité (sources : Tristan Mendès France/X, 6 avril 2025 ; Random Debunk/X, 6 avril 2025 ; Libération, 6 avril 2025 ; Le Monde, 6 avril 2025 ; Huffpost, 6 avril 2025 ; Le Dauphiné Libéré, 6 avril 2025).

« GRAND REMPLACEMENT ». Au micro de Louis Sarkozy, Bruno Retailleau a affirmé que « l'extrême gauche » avait un « projet de créolisation » visant à « l'effacement de notre civilisation » : « Il y a un projet clairement assumé, qui est le projet de l'extrême gauche française […] pour la créolisation. Ce qu'ils veulent, dans une stratégie de désordre, de chaos, c'est l'effacement de ce que nous sommes, de notre civilisation. C'est clairement leur projet » [archive]. Interrogé sur CNews par Erik Tegnėr, le directeur du mensuel d'extrême droite Frontières, Laurent Wauquiez, le concurrent de Bruno Retailleau pour la présidence du parti Les Républicains, a déclaré quant à lui qu'il ne considérait pas l'expression « Grand Remplacement » comme une théorie conspirationniste mais comme une « réalité démographique » [archive] (sources : Conspiracy Watch/Bluesky, TF1, 3 avril 2025).

ILIADE. Le 12e colloque de l’Institut Iliade s’est tenu le 5 avril à la Maison de la Chimie. Plus d’un millier de radicaux ont répondu à l’appel. On pouvait y voir notamment Daniel Conversano, les membres du groupe identitaire Némésis, Pierre Gentillet, candidat RN dans le Cher lors des dernières législatives et cofondateur de la Cocarde ou encore l’éditrice de l’influenceur Papacito (source : Libération, 8 avril 2025).

DIEUDONNÉ. « Trop de gens l’ont enterré trop vite ». Tantôt invité d’un podcast après ses « excuses » à la communauté juive, tantôt victorieux face aux préfets interdisant ses spectacles... le comédien et polémiste Dieudonné M'Bala M'Bala ne cesse d’utiliser l’arme de la provocation, du complotisme et de l'antisémitisme [archive] (source : L’Express, 6 avril 2025). Sur son compte X (230 000 abonnés), il annonce début mars qu’il est « encore là ! Pour combien de temps je sais pas… Mais j’ai decidé d’envoyer la purée ! Rendez-vous en tournée partout en France. Il veulent la guerre ?! C’est parti ! » [archive].

LAURA LOOMER. Plusieurs membres du Conseil de la sécurité nationale ont été évincés après une réunion le 2 avril entre Donald Trump et Laura Loomer (1,6 million d’abonnés sur X). Donald Trump nie avoir agi sur ses recommandations tout en la qualifiant de « grande patriote » et saluant ses interventions qu’il juge généralement constructives. Laura Loomer a précisé avoir présenté ses « recherches » au président et avoir insisté sur « la nécessité de sélectionner de manière très rigoureuse » les membres de son équipe. Bannie de divers réseaux sociaux et de PayPal en février 2019, l’influenceuse déverse fausses informations, propos complotistes et racistes. Elle a entre autres affirmé que les attentats du 11-Septembre relevaient d’un « complot interne »... (sources : 20 Minutes, 4 avril 2025 ; Le Nouvel Observateur, 4 avril 2025).

RUSSELL BRAND. De comédien star à influenceur complotiste. Le Britannique, révélé par la chaîne américaine MTV et extrêmement suivi sur les réseaux, est visé par de multiples accusations de viols et d’agressions sexuelles. Ce soutien de Donald Trump aime donner des conseils conjugaux tout en prônant des théories du complot. Dans ses vidéos aux millions de vues diffusées sur les réseaux sociaux, il dénonce les atteintes aux libertés au nom du Covid-19, les médias traditionnels et les politiques. Il entretient une amitié de longue date avec le complotiste radical David Icke (source : Le Temps, 5 avril 2025).

VENEZUELA. « Opération sous faux drapeaux ». Le 6 avril, l’armée vénézuélienne s’est déclarée en « état d’alerte » après la dénonciation d’un complot présumé projetant l'attaque du groupe pétrolier américain ExxonMobil au Guyana pour en faire porter la responsabilité au gouvernement du président vénézuélien Nicolás Maduro. Les forces armées vénézuéliennes ont affirmé dimanche leur « volonté de fer » de « répondre par des actions énergiques » à « toute menace pesant sur l’intégrité et la paix » de leur pays. Ces déclarations font écho à celles de la vice-présidente vénézuélienne Delcy Rodríguez qui avait mis en garde la veille contre « une opération sous faux drapeau prévue pour attaquer la plateforme d’ExxonMobil » au large de l’Essequibo, afin de l’attribuer au Venezuela et « provoquer de la confusion et générer une escalade de l’agression » (source : Ouest-France, 7 avril 2025).

AFRIQUE. Une rumeur sur les voleurs de sexe qui circule depuis des décennies en Afrique a servi de matrice à une fake news. Un article publié par le site malien Bamada.net insinue que des vols de sexe seraient orchestrés par l’État français afin de pallier la baisse de la fécondité et restaurer la virilité en berne de sa population masculine, allant jusqu’à mettre personnellement en cause un diplomate de l’ambassade de France en Centrafrique. Et, derrière lui, Emmanuel Macron... (source : La Vie des idées, 8 avril 2025).

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