Conspiracy Watch | l'Observatoire du conspirationnisme
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Comment les complotistes ont instrumentalisé l'attentat contre Robert Fico

L'extrême droite impute à Kiev, à l'OTAN et aux « mondialistes » la responsabilité de la tentative de meurtre qui a visé le Premier ministre slovaque.

L'attentat contre Robert Fico le 15 mai à Handlova (capture d'écran YouTube).

Le 15 mai dernier, quelques minutes après que le Premier ministre de la Slovaquie Robert Fico venait de se faire tirer dessus, une myriade de comptes et de médias pro-Kremlin ou directement affiliés à la Russie – comme la chaîne Telegram Pravda.ru – ont donné le coup d’envoi à une vaste campagne de désinformation contre… Kiev !

L’Ukraine fut en effet accusée – sans la moindre preuve, cela va sans dire, même si le pays est indéniablement frontalier de la Slovaquie – d’être derrière l’attentat qui a failli coûter la vie au chef du gouvernement slovaque. Margarita Simonian, la patronne de Russia Today et propagandiste attitrée du Kremlin sur les chaînes de télévision publiques russes, a ainsi rapidement pointé du doigt les « néo-nazis ukrainiens ».

Comme une trainée de poudre, des conspirationnistes d'extrême droite à travers le monde ont rejoint le mouvement. Il existerait selon eux un faisceau d’indices reliant la tentative de meurtre qui a visé Fico et ses prises de position anti-vaccins ou anti-OTAN.

Pour Andrew Tate, un masculiniste accusé d'abus sexuels et coutumier de la désinformation, c’est parce que Fico a rejeté l’Accord mondial de l’OMS sur la prévention des pandémies et qu’il s’est opposé à la guerre en Ukraine qu’il aurait été ciblé : « Les ennemis de la vérité ne cachent plus leurs intentions, ils ont abandonné l'ombre pour la force » poursuit-il sur X. De la même manière, l’animateur complotiste américain Alex Jones s’est demandé qui voudrait la mort de Robert Fico en partageant un article sur le veto de Fico à l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN. Ici, Florian Philippot leur a emboité le pas. Après avoir notamment présenté Fico comme « un ardent militant de la Paix refusant les politiques de l’OTAN et l’UE consistant à armer et financer l’Ukraine », le président des Patriotes a écrit : « Exigeons la vérité sur cet attentat ! Soutien aux résistants anti-euromondialistes ! »

Source : Florian Philippot/X, 15/05/2024.

Formellement de centre gauche mais en réalité populiste et ouvertement pro-Poutine, Fico est un acteur clé de la politique slovaque depuis près de deux décennies. Celui qui s’est taillé au fil des ans une réputation d’« Orbán de gauche », en raison de ses positions hostiles à l’immigration, fut élu pour la première fois en 2006, deux ans après l’adhésion de son pays à l’Union européenne, et grâce à une alliance avec les nationalistes. En 2018, l’assassinat du journaliste d'investigation Ján Kuciak, qui enquêtait sur la corruption au sein du gouvernement slovaque, a précipité sa chute. Mais l'année dernière, Fico est revenu au pouvoir après avoir promis de réduire l'immigration et de mettre fin à l'aide militaire à Kiev.

Dans cette « Mitteleuropa » où les démocraties sont encore jeunes, sa posture et son tropisme autoritaire lui attirent la sympathie de Moscou et de Budapest, bien plus que de Bruxelles. Au Parlement européen, SMER-SD, le parti politique de Fico, était affilié jusqu’à l’année dernière au Parti socialiste européen. Il s’en est fait exclure pour cause d’extrême-droitisation.

Des récits contradictoires ont été diffusés sur l’auteur de l’attentat : Juraj Cintula, qui dit aujourd’hui regretter son geste et affirme ne pas avoir voulu tuer Fico, aurait agi pour des raisons politiques. Il reprochait au Premier ministre slovaque d’avoir aboli le bureau du procureur spécial, les attaques contre les médias, l’arrêt de l’aide militaire à l’Ukraine et sa politique à l’égard de l’UE. Mais ce retraité de 71 ans semble également avoir des liens avec une organisation para militaire pro-russe.

Alors que Fico est désormais dans un état « stable » mais toujours « sérieux », le ministre de l'intérieur slovaque a mis en garde contre le risque de « guerre civile » qui menace le petit État d'Europe centrale.

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L'attentat contre Robert Fico le 15 mai à Handlova (capture d'écran YouTube).

Le 15 mai dernier, quelques minutes après que le Premier ministre de la Slovaquie Robert Fico venait de se faire tirer dessus, une myriade de comptes et de médias pro-Kremlin ou directement affiliés à la Russie – comme la chaîne Telegram Pravda.ru – ont donné le coup d’envoi à une vaste campagne de désinformation contre… Kiev !

L’Ukraine fut en effet accusée – sans la moindre preuve, cela va sans dire, même si le pays est indéniablement frontalier de la Slovaquie – d’être derrière l’attentat qui a failli coûter la vie au chef du gouvernement slovaque. Margarita Simonian, la patronne de Russia Today et propagandiste attitrée du Kremlin sur les chaînes de télévision publiques russes, a ainsi rapidement pointé du doigt les « néo-nazis ukrainiens ».

Comme une trainée de poudre, des conspirationnistes d'extrême droite à travers le monde ont rejoint le mouvement. Il existerait selon eux un faisceau d’indices reliant la tentative de meurtre qui a visé Fico et ses prises de position anti-vaccins ou anti-OTAN.

Pour Andrew Tate, un masculiniste accusé d'abus sexuels et coutumier de la désinformation, c’est parce que Fico a rejeté l’Accord mondial de l’OMS sur la prévention des pandémies et qu’il s’est opposé à la guerre en Ukraine qu’il aurait été ciblé : « Les ennemis de la vérité ne cachent plus leurs intentions, ils ont abandonné l'ombre pour la force » poursuit-il sur X. De la même manière, l’animateur complotiste américain Alex Jones s’est demandé qui voudrait la mort de Robert Fico en partageant un article sur le veto de Fico à l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN. Ici, Florian Philippot leur a emboité le pas. Après avoir notamment présenté Fico comme « un ardent militant de la Paix refusant les politiques de l’OTAN et l’UE consistant à armer et financer l’Ukraine », le président des Patriotes a écrit : « Exigeons la vérité sur cet attentat ! Soutien aux résistants anti-euromondialistes ! »

Source : Florian Philippot/X, 15/05/2024.

Formellement de centre gauche mais en réalité populiste et ouvertement pro-Poutine, Fico est un acteur clé de la politique slovaque depuis près de deux décennies. Celui qui s’est taillé au fil des ans une réputation d’« Orbán de gauche », en raison de ses positions hostiles à l’immigration, fut élu pour la première fois en 2006, deux ans après l’adhésion de son pays à l’Union européenne, et grâce à une alliance avec les nationalistes. En 2018, l’assassinat du journaliste d'investigation Ján Kuciak, qui enquêtait sur la corruption au sein du gouvernement slovaque, a précipité sa chute. Mais l'année dernière, Fico est revenu au pouvoir après avoir promis de réduire l'immigration et de mettre fin à l'aide militaire à Kiev.

Dans cette « Mitteleuropa » où les démocraties sont encore jeunes, sa posture et son tropisme autoritaire lui attirent la sympathie de Moscou et de Budapest, bien plus que de Bruxelles. Au Parlement européen, SMER-SD, le parti politique de Fico, était affilié jusqu’à l’année dernière au Parti socialiste européen. Il s’en est fait exclure pour cause d’extrême-droitisation.

Des récits contradictoires ont été diffusés sur l’auteur de l’attentat : Juraj Cintula, qui dit aujourd’hui regretter son geste et affirme ne pas avoir voulu tuer Fico, aurait agi pour des raisons politiques. Il reprochait au Premier ministre slovaque d’avoir aboli le bureau du procureur spécial, les attaques contre les médias, l’arrêt de l’aide militaire à l’Ukraine et sa politique à l’égard de l’UE. Mais ce retraité de 71 ans semble également avoir des liens avec une organisation para militaire pro-russe.

Alors que Fico est désormais dans un état « stable » mais toujours « sérieux », le ministre de l'intérieur slovaque a mis en garde contre le risque de « guerre civile » qui menace le petit État d'Europe centrale.

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à propos de l'auteur
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Emma-Kate Symons
Emma-Kate Symons est une journaliste et chroniqueuse basée à Paris qui a été publiée dans le Washington Post, le Wall Street Journal, Foreign Policy, The Atlantic, The New European, Reuters et Franc-Tireur. Formée à l'université de Sydney et à l'université de Columbia, elle a réalisé des reportages dans toute l'Europe, ainsi qu'à New York, Washington, Manille, Bangkok et Canberra.
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