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Enquête complotisme 2019 : le conspirationnisme et l'extrême droite

Publié par Valérie Igounet20 février 2019,

Dans quelle mesure la proximité avec l’extrême droite est-elle corrélée à l’adhésion aux thèses complotistes ? C’est ce que révèle notamment la deuxième vague de l’enquête de la Fondation Jean-Jaurès et Conspiracy Watch réalisée par l’Ifop sur l’état du complotisme en France. Valérie Igounet, historienne et spécialiste du négationnisme et de l’extrême droite, analyse pour ce quatrième volet de l’enquête la porosité entre les deux courants.

Conférence de presse de Marine Le Pen (capture d'écran YouTube/Rassemblement national, 3 décembre 2018)

La deuxième vague de l’enquête sur le complotisme confirme plusieurs enseignements par rapport à la précédente, dont celui-ci : le positionnement politique, notamment à l’extrême droite, reste une des variables induisant une adhésion plus forte que la moyenne aux représentations conspirationnistes.

À travers cette seconde enquête, les électeurs de Marine Le Pen au premier tour de la dernière élection présidentielle, tout comme les sympathisants du Rassemblement national (RN), montrent leur propension à adhérer davantage que les autres électorats aux différents items conspirationnistes proposés. Certains sont en corrélation avec la matrice idéologique du parti lepéniste. D’autres n’ont aucun rapport avec cette dernière, si ce n’est la croyance à un complot. Par exemple, le climato-complotisme (« Le réchauffement climatique n’existe pas, c’est une thèse avant tout défendue par des politiques et des scientifiques pour faire avancer leurs intérêts ») est deux fois plus prégnant chez les sympathisants du Rassemblement national et chez les électeurs de Marine Le Pen.

Les sympathisants du Rassemblement national souscrivent davantage à une interprétation complotiste que les électeurs de Marine Le Pen à la dernière présidentielle. Les premiers, constituant le noyau dur, sont davantage fidèles au parti lepéniste qui répond politiquement, plus ou moins à long terme, à leurs demandes et à leurs préoccupations tandis que le fait de déposer un bulletin au nom de Marine Le Pen dans l’urne lors de l’élection présidentielle peut être un acte sans suite, reposant sur diverses motivations.

Le Rassemblement national capte davantage les suffrages des complotistes convaincus

L’adhésion lepéniste aux différentes théories conspirationnistes se situe largement au-dessus de celle de l’ensemble de la population soumise à l’enquête. L’électorat du Rassemblement national n’est pas que surreprésenté pour certains items. Il se place, pour la grande majorité, en première position.

Marine Le Pen est la personnalité politique qui capte le plus les suffrages des personnes les plus perméables au complotisme (celles qui sont « d’accord » avec au moins cinq sur dix théories du complot proposées), qui sont surreprésentées chez les sympathisants du Rassemblement national (35% contre 21% en moyenne) et La France insoumise (29%). La sympathie partisane pour le Rassemblement national est, de ce point de vue, le négatif de celle en faveur de La République en marche (9% contre 21% en moyenne).

Ceux qui se reconnaissent dans le Rassemblement national tout comme les électeurs de Marine Le Pen en avril 2017 montrent également une défiance assumée envers certaines institutions – école et justice – et dans les médias. Si un Français sur quatre dit ne pas avoir confiance du tout dans ces derniers, les sympathisants du Rassemblement national et les électeurs de Marine Le Pen sont de loin les premiers à partager cette opinion (respectivement 39% et 38% contre 26% en moyenne). À plusieurs reprises, le parti lepéniste a pointé parmi ses adversaires les « médias officiels » (sic) et les intellectuels. Selon Marine Le Pen, les « médias ont perdu la confiance des Français ». La présidente du Rassemblement national est consciente également qu’une partie des (jeunes) adhérents du Rassemblement national – et de ses cadres – est très critique vis-à-vis des médias et de l’information qu’ils délivrent – notamment la presse écrite nationale – et s’informe avant tout par Internet et les réseaux sociaux. Récemment encore, Jordan Bardella, tête de liste du Rassemblement national aux élections européennes, revendiquait sur France Inter qu’ils avaient le « droit d’avoir un avis divergent ».

Les chiffres enregistrés s’agissant du jugement à l’égard de l’attentat de Strasbourg ne démentent pas ce constat. Les partisans de la thèse d’une « manipulation gouvernementale » visant à détourner l’attention des Français et à créer de l’inquiétude dans la population en plein mouvement des « gilets jaunes » sont ainsi nettement surreprésentés chez les sympathisants du Rassemblement national et les électeurs de Marine Le Pen (respectivement 22% et 18% contre 10% en moyenne). Ils sont ainsi deux fois plus nombreux que le reste des Français à adhérer à la version conspirationniste de cet événement. [...]

>>> Lire, sur le site de la Fondation Jean-Jaurès, l’intégralité de la note de Valérie Igounet.

 

Voir aussi :

22% des Français approuveraient l’idée qu’il existe un « complot sioniste mondial »

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Conférence de presse de Marine Le Pen (capture d'écran YouTube/Rassemblement national, 3 décembre 2018)

La deuxième vague de l’enquête sur le complotisme confirme plusieurs enseignements par rapport à la précédente, dont celui-ci : le positionnement politique, notamment à l’extrême droite, reste une des variables induisant une adhésion plus forte que la moyenne aux représentations conspirationnistes.

À travers cette seconde enquête, les électeurs de Marine Le Pen au premier tour de la dernière élection présidentielle, tout comme les sympathisants du Rassemblement national (RN), montrent leur propension à adhérer davantage que les autres électorats aux différents items conspirationnistes proposés. Certains sont en corrélation avec la matrice idéologique du parti lepéniste. D’autres n’ont aucun rapport avec cette dernière, si ce n’est la croyance à un complot. Par exemple, le climato-complotisme (« Le réchauffement climatique n’existe pas, c’est une thèse avant tout défendue par des politiques et des scientifiques pour faire avancer leurs intérêts ») est deux fois plus prégnant chez les sympathisants du Rassemblement national et chez les électeurs de Marine Le Pen.

Les sympathisants du Rassemblement national souscrivent davantage à une interprétation complotiste que les électeurs de Marine Le Pen à la dernière présidentielle. Les premiers, constituant le noyau dur, sont davantage fidèles au parti lepéniste qui répond politiquement, plus ou moins à long terme, à leurs demandes et à leurs préoccupations tandis que le fait de déposer un bulletin au nom de Marine Le Pen dans l’urne lors de l’élection présidentielle peut être un acte sans suite, reposant sur diverses motivations.

Le Rassemblement national capte davantage les suffrages des complotistes convaincus

L’adhésion lepéniste aux différentes théories conspirationnistes se situe largement au-dessus de celle de l’ensemble de la population soumise à l’enquête. L’électorat du Rassemblement national n’est pas que surreprésenté pour certains items. Il se place, pour la grande majorité, en première position.

Marine Le Pen est la personnalité politique qui capte le plus les suffrages des personnes les plus perméables au complotisme (celles qui sont « d’accord » avec au moins cinq sur dix théories du complot proposées), qui sont surreprésentées chez les sympathisants du Rassemblement national (35% contre 21% en moyenne) et La France insoumise (29%). La sympathie partisane pour le Rassemblement national est, de ce point de vue, le négatif de celle en faveur de La République en marche (9% contre 21% en moyenne).

Ceux qui se reconnaissent dans le Rassemblement national tout comme les électeurs de Marine Le Pen en avril 2017 montrent également une défiance assumée envers certaines institutions – école et justice – et dans les médias. Si un Français sur quatre dit ne pas avoir confiance du tout dans ces derniers, les sympathisants du Rassemblement national et les électeurs de Marine Le Pen sont de loin les premiers à partager cette opinion (respectivement 39% et 38% contre 26% en moyenne). À plusieurs reprises, le parti lepéniste a pointé parmi ses adversaires les « médias officiels » (sic) et les intellectuels. Selon Marine Le Pen, les « médias ont perdu la confiance des Français ». La présidente du Rassemblement national est consciente également qu’une partie des (jeunes) adhérents du Rassemblement national – et de ses cadres – est très critique vis-à-vis des médias et de l’information qu’ils délivrent – notamment la presse écrite nationale – et s’informe avant tout par Internet et les réseaux sociaux. Récemment encore, Jordan Bardella, tête de liste du Rassemblement national aux élections européennes, revendiquait sur France Inter qu’ils avaient le « droit d’avoir un avis divergent ».

Les chiffres enregistrés s’agissant du jugement à l’égard de l’attentat de Strasbourg ne démentent pas ce constat. Les partisans de la thèse d’une « manipulation gouvernementale » visant à détourner l’attention des Français et à créer de l’inquiétude dans la population en plein mouvement des « gilets jaunes » sont ainsi nettement surreprésentés chez les sympathisants du Rassemblement national et les électeurs de Marine Le Pen (respectivement 22% et 18% contre 10% en moyenne). Ils sont ainsi deux fois plus nombreux que le reste des Français à adhérer à la version conspirationniste de cet événement. [...]

>>> Lire, sur le site de la Fondation Jean-Jaurès, l’intégralité de la note de Valérie Igounet.

 

Voir aussi :

22% des Français approuveraient l’idée qu’il existe un « complot sioniste mondial »

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à propos de l'auteur
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Valérie Igounet
Directrice-adjointe de Conspiracy Watch, Valérie Igounet est docteure en histoire (Sciences Po Paris) et chercheuse associée à l’Institut d’Histoire du Temps Présent (CNRS). Ses recherches se situent au croisement de l’histoire politique et de l’histoire des idées. Spécialiste du négationnisme et de l’extrême droite en France après 1945, elle est notamment l’autrice de Robert Faurisson. Portrait d’un négationniste (Denoël, 2012), de Le négationnisme en France (PUF, Que sais-je ?, 2020) et des romans graphiques Ils sont partout. Voyage en terres conspirationnistes (Les Arènes, 2022) et Crayon noir. Samuel Paty, histoire d'un prof (StudioFact éditions, 2023). Elle a co-écrit avec Michaël Prazan le film documentaire « Les Faussaires de l’histoire » (France 5, 2014) et a animé le blog « Derrière le Front. Histoires, analyses et décodages du Front national » sur FranceTVinfo.fr.
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