Le 5ème anniversaire du mouvement de la place Maïdan, qui a débouché sur l’éviction de l’ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch, est l’occasion de revenir sur plusieurs mythes et boniments complotistes qui circulent sur Internet en dehors de tout contrôle. Pour l’essentiel, ils alimentent la version des événements que le Kremlin cherche à imposer.
Les propos d’Etienne Chouard tenus dans une vidéo postée en août 2017 sur la chaîne YouTube ThinkerView à propos de la révolution ukrainienne de 2013-2014 ne sont pas seulement outranciers [1], ils sont aussi entièrement inexacts : sur le fil des événements, sur l’origine et les buts du mouvement, sur le rôle des États-Unis, et sur la nature du gouvernement qui a succédé à la fuite du président Viktor Ianoukovitch en Russie. Le grand écart avec la réalité commence dès la première phrase, qui suggère que l’Euromaïdan fut d’emblée une insurrection violente. Or il s’agit d’une protestation pacifique au départ.
La chronologie des événements
Le mouvement a commencé dans la nuit du 21 au 22 novembre 2013 grâce à des échanges sur les réseaux sociaux, lancés notamment par Mustafa Nayyem, journaliste et bloggeur ukrainien, qui appelle ses amis à se réunir sur la place Maïdan pour protester contre la volte-face du président Ianoukovitch qui venait de refuser de signer un accord d’association avec l’Union européenne (UE) au moment où il devait aboutir après des années de négociations [2]. Le mouvement s’amplifie rapidement, le pouvoir essaie de chasser les manifestants mais la répression policière ne fait que renforcer leur nombre. La violence monte d’un cran le 30 novembre : 86 personnes sont blessées, certaines grièvement, mais il ne s’agit pas encore d’une contre-insurrection armée. Le nombre de manifestants atteint plusieurs centaines de milliers le 1er décembre (400 000 à 800 000). D’autres villes d’Ukraine se soulèvent à leur tour (Lviv, Kharkiv, etc.). Les manifestants commencent à organiser un service de défense, de secours aux blessés et de recherche des disparus. Malgré les assassinats (au moins deux en janvier), l’intimidation par les titushki (des voyous embauchés et armés par les autorités), le gouvernement ne parvient pas à déloger les manifestants. Les opérations sont de de plus en plus violentes. 91 personnes sont tuées par balles entre le 18 et le 20 février. Parmi elles, 78 manifestants et 13 policiers. Au total, plus de 100 manifestants et 13 policiers et soldats ont été tués entre décembre et février. La police et les forces armées ont installé des snipers sur les toits d’immeubles, et les défenseurs du Maïdan ont fait de même avec des armes saisies sur les policiers. Le massacre le plus épouvantable a eu lieu le 20 février sur l’avenue Institutska : 48 manifestants tués par balles, 157 blessés.
La rumeur selon laquelle certains manifestants auraient été tués par des snipers « fascistes » – comprendre : liés au mouvement Euromaïdan – a été immédiatement lancée par les médias officiels russes, et relayée par des pseudos-antifascistes à tendance conspirationniste. Elle n’a aucun fondement concret, mais pouvait être accréditée par défaut, du fait de la confusion propre aux combats en milieu urbain, où il n’y a pas de ligne de front et où l’origine des tirs n’est pas toujours claire. C’est typiquement le genre de zones d’ombre dans lesquelles s’engouffrent les complotistes et les négationnistes de tout poil, en ignorant sciemment la masse d’indices contraires.
Or, il est établi aujourd’hui sans l’ombre d’un doute :
1) que le président Ianoukovitch a donné personnellement l’ordre d’utiliser des armes contre les manifestants ;
2) que la majorité des tirs sont le fait de « l’unité noire » des Berkout, qui ont utilisé des kalachnikov et des fusils de précision ;
3) que les snipers ont obéi aux responsables des forces de l’ordre.
Enfin, une expertise a permis d’établir avec précision l’origine des tirs mortels et même, dans certains cas, l’identité des tireurs, grâce à la reconstitution en 3D de la trajectoire des projectiles à partir des autopsies et des nombreux documents vidéo existants. Cette expertise exclut sans le moindre doute que les snipers du côté Euromaïdan, dont on connaît la position au moment des violences, aient pu être les auteurs de ces tirs mortels.
Le déclencheur de la révolution est connu : il s’agit du refus par le président Ianoukovitch de signer, en novembre 2013, un accord d’association avec l’UE négocié et attendu depuis 2007. Cet acte marquait la soumission de Ianoukovitch à Poutine et le retour de l’Ukraine sous hégémonie russe. Mais pour les manifestants de Maïdan, il s’agissait aussi de protester contre l’évolution quasi dictatoriale du régime – Ianoukovitch venait de faire passer une réforme constitutionnelle lui donnant à peu près les pleins pouvoirs – et contre la corruption et le pillage mafieux du pays par le clan Ianoukovitch. Après sa fuite, au lendemain de la tuerie du 20 février 2014, on découvrira dans son palais de Mejgorié aux environs de Kiev une accumulation invraisemblable de trésors de toutes natures : animaux exotiques, plomberie en or, lustre en cristal estimé à une valeur de 1,8 millions d’euros, etc., dignes d’un dictateur d’opérette (la résidence est depuis un musée ouvert aux visiteurs).
Les activistes du Maïdan étaient en majorité des jeunes CSP+. Ils représentaient des organisations et des sensibilités très diverses, de l’extrême gauche aux nationalistes radicaux, en passant par des militants LGBT, des activistes religieux, des patrons de PME, le Mejlis (organisation des Tatars de Crimée), des anciens combattants (vétérans de la guerre d’Afghanistan), mais aussi des Juifs soviétiques revenus en Ukraine après avoir émigré en Israël où ils avaient fait leur service militaire. Ces deux derniers groupes ont joué un rôle particulier dans l’auto-défense du Maïdan. Les uns étaient nationalistes, les autres pro-Européens, et la plupart les deux à la fois. « Nous méritons les valeurs européennes » clamaient les manifestants du Maïdan. Ce qui voulait dire : « nous ne voulons plus vivre comme des Soviétiques, dans la peur et la corruption ». L’une des premières victimes de la fusillade du 20 février s’appelait Joseph Schilling, un ouvrier maçon de 61 ans venu de l’ouest de l’Ukraine. Il était juif.
Les partis d’extrême-droite qui ont excité le pseudo-antifascisme, Svoboda et Pravy Sektor, ne constituaient qu’une très petite fraction des activistes du Maïdan. Au demeurant, ils ne peuvent pas être seulement assimilés à des groupuscules « fascistes » ou « néo-nazis » – qui sont tous, par-dessus le marché, viscéralement anti-ukrainiens et des soutiens zélés de Vladimir Poutine [3]. Le Parti Svoboda, créé en 1991, a été proche du Front national (FN) à ses débuts puis a rompu ce compagnonnage en raison des liens du FN et de la famille Le Pen avec le Kremlin et avec les ultra-nationalistes russes comme Vladimir Jirinovski, eux d’authentiques fascistes. Il y a en Ukraine, comme partout, des groupuscules fascistes et des nazillons, mais ils jouaient alors et jouent aujourd’hui encore un rôle marginal, sous leurs propres étiquettes, parfois après s’être fait exclure de ces organisations nationalistes. Le « nationalisme » en Ukraine doit être apprécié à la lumière de la situation post-coloniale d’un pays récemment sorti de 70 ans de domination soviétique (et auparavant russe et austro-hongroise). Il n’est pas de même nature que le souverainisme xénophobe et anti-européen d’Europe occidentale (RN, DLF et Siel en France, AfD en Allemagne, Lega en Italie, etc.).
L’extrême droite ukrainienne a cette particularité d’être profondément divisée entre des nationalistes patriotes, autrefois anti-soviétiques et aujourd’hui anti-Poutine, et des militants animés par la haine de l’Europe et de la démocratie, soutenus par le Kremlin, et qui appartiennent le plus souvent aux réseaux de l’extrême droite européenne, comme l’Alliance européenne des mouvements nationaux (AEMN) créée par le mouvement hongrois Jobbik, ou l’Alliance pour la Paix et la Liberté de Roberto Fiore (Forza Nuova), qui comprend notamment Aube Dorée et le NPD allemand (néo-nazis). Ce clivage traverse aussi bien les mouvements insérés dans la politique parlementaire comme Svoboda et Pravy Sektor que les groupuscules paramilitaires. Svoboda et C14, un groupuscule néo-nazi, se prétendent ultra-nationalistes tout en entretenant des liens troubles avec le Kremlin et avec des mouvements européens ouvertement anti-ukrainiens et proches de Moscou.
Cette ambiguïté – c’est un euphémisme – n’est pas pour rien dans l’effondrement électoral de Svoboda en 2014 après son succès éphémère en 2012. Son président, Oleh Tyahnybok, fort de son statut de leader d’un parti d’opposition important, s’était affiché sur la scène du Maïdan aux côtés des partis démocratiques et de visiteurs étrangers prestigieux comme John McCain venu soutenir la révolution. Mais cela n’a pas empêché sa quasi disparition du paysage politique : à l’élection présidentielle de mai 2014, qui a suivi la révolution, Svoboda ne recueille que 1,16% des suffrages ; aux élections législatives d’octobre 2014, il tombe de 11% en 2012, à 4,72%. Avec les 1,8% de Pravy Sektor, l’extrême droite n’a plus que 7 sièges au Parlement sur 450. Aux élections législatives de 2012, Svoboda avait obtenu un succès spectaculaire, passant de 0 à 37 sièges, car il était apparu à beaucoup d’Ukrainiens comme le seul parti véritablement opposé au Parti des régions de Viktor Ianoukovitch… jusqu’à ce qu’on découvre des connections financières et politiques entre les deux partis.
La même ambiguïté est exacerbée dans les groupuscules paramilitaires où coexistent des volontaires revenus du Donbass déçus des atermoiements de Petro Porochenko (selon eux) dans la conduite de la guerre contre la Russie, et des néo-nazis pro-russes farouchement anti-ukrainiens. La confusion mentale, l’antisémitisme et le goût de la violence qui les réunissent les empêchent aussi d’avoir la moindre influence politique.
Chouard parle d’un « gouvernement nazi », puis de « deux ministres nazis ». Il ne donne pas de noms mais il vise sans doute Andriy Parubiy et Oleksandr Tourtchynov, premier président de l’Ukraine pendant la période de transition (février-juin 2014) et ministre de la défense depuis décembre 2014. À moins qu’il ne s’agisse d’Ihor Tenioukh, membre de Svoboda, chef d’état-major de la marine de 2006 à 2010 et éphémère ministre de la défense dans le premier gouvernement de l’après Ianoukovitch, dirigé par Arseni Iatseniouk, dont il démissionne en mars 2014 après l’invasion de la Crimée par les troupes russes.
Après avoir été le principal responsable du service d’auto-défense du Maïdan, Andriy Parubiy a été secrétaire du Conseil de sécurité nationale de février jusqu’à août 2014, date à laquelle il démissionne. Député depuis 2007, il est président du Parlement (la Rada) depuis avril 2016, succédant à Volodymyr Hroïsman devenu Premier ministre.
Dans l’URSS des années 80, Andriy Parubiy était un activiste indépendantiste : il avait été arrêté à 17 ans (en 1988) pour avoir participé à un rassemblement illégal pour l’indépendance de l’Ukraine – il était alors strictement interdit de s’exprimer en faveur d'une indépendance. En 1991, à l’indépendance de l’Ukraine, il a fait partie des principaux cofondateurs, avec Oleh Tyahnybok, d’un parti indépendantiste de type néonazi, le « Parti social-nationaliste d’Ukraine » dont l'emblème (la Wolfsangel), directement issu de la symbolique hitlérienne, fut abandonné en 2003. Ce parti conclut des accords avec des partis d’extrême droite en Europe, dont le FN de Jean-Marie Le Pen.
Mais avec la révolution orange de 2004, lorsque son ancien parti prend le nom de « Svoboda » (Union panukrainienne Liberté), il le quitte définitivement et devient résolument pro-européen. Il a 33 ans. Huit ans plus tard, il est élu sous la bannière du parti de Ioulia Tymochenko, « La Patrie ». Puis, aux élections législatives de 2014, il est élu député du « Front populaire », le parti d’Arseni Iatseniouk, le premier Premier ministre de Petro Porochenko. Andriy Parubiy a le triste privilège d’être l’objet d’un procès insistant en nazification alimenté par Sputnik et Russia Today. Jean-Luc Mélenchon twittait par exemple en juin 2018 : « Demain de Rugy reçoit solennellement le néonazi antisémite ukrainien Svoboda ! (sic) Voilà où mène l'atlantisme forcené. » On lui attribue notamment un éloge de Hitler. Or il s’agit d’un faux, basé sur la déformation d’une interview, publiée en mai 2018 à l’occasion d’un débat sur la place du référendum dans la Constitution. Tout en déclarant qu’il est favorable à la démocratie directe, Parubiy souligne qu’il faut être prudent et responsable dans l’institution du référendum car la manipulation de la démocratie directe a été un instrument-clé de la prise de pouvoir par Hitler en Allemagne. Allusion historiquement exacte aux plébiscites à répétition (novembre 1933, février 1934, février 1936) organisés par Hitler après sa victoire aux élections de janvier 1933 et qui lui servirent à asseoir sa dictature et à démanteler les institutions parlementaires [4]. Si Parubiy ne s’est jamais exprimé sur Svoboda depuis 2014, en particulier sur les sorties antisémites régulières de son président Oleh Tyahnybok, on n’a pas trouvé la moindre trace de déclarations antisémites de Parubiy, même dans ses écrits et déclarations de jeunesse, quand il était ultra-nationaliste, bien qu’ils soient scrutés à la loupe par le site d’extrême-gauche ukrainien Commons, ou par le Kharkiv Human Rights Protection Group, la principale agence indépendante dédiée à l’information sur les droits de l’homme en Ukraine.
Quant à Tourtchynov qui, lui, n’a jamais été membre de Svoboda ni d’aucun mouvement extrémiste (à l’exception du PCUS, dont il fut membre de 1988 à 1991), en dehors du fait qu’il a dirigé un laboratoire de recherche sur l’économie souterraine (1994-1998), qu’il a soutenu activement dès le début de la guerre dans le Donbass les volontaires qui combattent aux côtés de l’armée régulière, qu’il est baptiste et s'est distingué une fois par des propos homophobes [5], rien ne le qualifie comme « nazi ».
Selon Chouard, Victoria Nuland, assistante du secrétaire d'État américain pour l'Europe et l'Eurasie pendant la présidence Obama, se serait félicitée que les États-Unis aient donné 5 milliards de dollars pour financer le « coup d’état » du Maïdan. Victoria Nuland est la bête noire de la propagande russe et des complotistes pro-russes, de gauche et de droite, parce qu’elle était présente à Kiev au moment du Maïdan, qu’elle est connue pour son franc-parler, qu’elle s’est montrée distribuant des croissants aux manifestants et qu’elle a plaidé la cause de la révolution ukrainienne auprès du Département d’État et d’un président proverbialement frileux. Pour autant, les États-Unis n’ont pas financé l’Euromaïdan. Ils ont en revanche accordé une aide de 1 milliard de dollars d’aide militaire à l’Ukraine au lendemain de la révolution, après que la Russie a envahi la Crimée et déclenché la guerre dans le Donbass.
Les déclarations d’Etienne Chouard n’ont même pas le mérite de l’originalité puisqu’il ne s’agit que d’un copier-coller fidèle d’éléments de langage diffusés par la propagande russe dès 2013, pendant l’Euromaïdan, et ressassés depuis avec constance, malgré l’absence de preuves et d’innombrables réfutations. Comment exprimer la prégnance de ce discours ?
La force du mensonge russe sur la révolution ukrainienne en dépit de ses invraisemblances repose sur son inscription dans le récit de la Grande Guerre patriotique : ce qui se passe en Ukraine ne serait que la reproduction de la lutte contre le fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale. La Russie et les séparatistes du Donbass rejouent, littéralement, le combat héroïque contre la barbarie nazie. Ce cadrage fantasmatique a un grand pouvoir de séduction, d’enrôlement même. Or il repose sur une double supercherie. Premièrement, la situation présente n’a rien à voir avec la Seconde Guerre mondiale. Deuxièmement, le grand récit soviétique, repris tel quel par la Russie de Poutine est lui-même une falsification de l’histoire : dans ce récit, la guerre de 1941-1945 (oui vous avez bien lu, exit les deux ans d’alliance soviéto-nazie de 1939 à juin 1941) n’est pas une guerre mondiale mais l’agression de l’Allemagne contre la seule URSS, qui aurait été la seule à vaincre le fascisme, les Alliés n’ayant fait que de la figuration. D’où ce qu’on pourrait appeler l’antifascisme tautologique :
Ce pseudo-antifascisme a longtemps faussé la culture politique de gauche. Il imprègne encore une partie de l’extrême-gauche européenne, aveugle à la dynamique rouge-brune entretenue par le Kremlin.
Notes :
[1] Sans être contredit, Etienne Chouard affirme : « Qu'est-ce qui s'est passé à Maïdan, en Ukraine ? Tu as des gens armés, des snipers, qui étaient sur les immeubles, qui tiraient sur les flics et qui tiraient sur les manifestants, qui tiraient sur tout le monde pour que soit renversé un gouvernement élu ? Et à la place, on a mis un gouvernement nazi – ouvertement nazi, hein ! En Ukraine, c'est un gouvernement nazi. Il y a deux ministres qui font le salut hitlérien. C'est des vrais nazis. Et c'est financé. […] Victoria Nuland, a avoué ! […] Elle a dit : "On a bien fait de mettre ces 5 milliards de dollars". Donc les États Unis ont financé ce renversement, ce coup d'Etat. […] Enfin, je me trompe peut-être parce que j'y suis pas... J'y suis pas, et vraiment, je me trompe peut-être. Mais enfin, tu me demandes... ».
[2] Né à Kaboul en 1981, Mustapha Nayyem est l’une des principales figures du Maïdan qui sont entrés en politique après la révolution. Elu à la Rada en 2014 sur une liste de soutien à Petro Porochenko, il rejoint le petit parti d’opposition Alliance Démocratique et se consacre essentiellement à la lutte contre la corruption.
[3] Des militants d’extrême-droite se sont engagés dans le Donbass aux côtés des séparatistes pro-russes dès 2014. D’après une enquête de StreetPress de 2016, ils seraient une quarantaine, parmi lesquels des militants de Troisième voie, le groupuscule de Serge Ayoub, de L’Unité Continentale (franco-serbe), le vétéran Erwan Castel. Tantôt volontaires, tantôt mercenaires, ces troupes ont reçu des renforts « civils » de journalistes et de personnalités politiques, lors des simulacres d’élections organisées en 2014 et en 2018. En novembre 2018, les élections générales dans les républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk ont bénéficié d’un contingent d’observateurs internationaux de 26 pays ou pseudo-pays (12 pays européens, mais aussi la Turquie, l’Abkhazie et l’Ossétie du sud (territoires géorgiens annexés par la Russie depuis 2008), la Palestine, le Congo, l’Irak, le Brésil, le Chili, etc.). On y trouve beaucoup de représentants de la nébuleuse rouge-brun, mais aussi des partis de gouvernement comme Die Linke et AfD pour l’Allemagne, Forza Italia. Particularité française, une forte représentation des Républicains (5) qui ont côtoyé sans problèmes les identitaires Mikola Provic, Julien Rochedy ou l’expert militaire Xavier Moreau, habitué de RT et du site d’Alain Soral Égalité & Réconciliation.
[4] Voir l’analyse de Halya Coniash, assortie de la transcription complète de l’interview en anglais.
[5] En août 2007, Tourtchynov a été épinglé par l’ONG britannique The Lesbian and Gay Foundation pour avoir déclaré : « Si un homme a des conceptions normales, vous l’étiquetez comme conservateur, mais ceux qui consomment des drogues et font la promotion de la sodomie, vous les qualifiez de progressistes. Toutes ces choses sont des perversions ».
Les auteurs :
Hélène Roudier de Lara est professeur agrégée de philosophie.
Philippe de Lara est politiste, maître de conférences à l'université Paris 2 Panthéon Assas.
Les propos d’Etienne Chouard tenus dans une vidéo postée en août 2017 sur la chaîne YouTube ThinkerView à propos de la révolution ukrainienne de 2013-2014 ne sont pas seulement outranciers [1], ils sont aussi entièrement inexacts : sur le fil des événements, sur l’origine et les buts du mouvement, sur le rôle des États-Unis, et sur la nature du gouvernement qui a succédé à la fuite du président Viktor Ianoukovitch en Russie. Le grand écart avec la réalité commence dès la première phrase, qui suggère que l’Euromaïdan fut d’emblée une insurrection violente. Or il s’agit d’une protestation pacifique au départ.
La chronologie des événements
Le mouvement a commencé dans la nuit du 21 au 22 novembre 2013 grâce à des échanges sur les réseaux sociaux, lancés notamment par Mustafa Nayyem, journaliste et bloggeur ukrainien, qui appelle ses amis à se réunir sur la place Maïdan pour protester contre la volte-face du président Ianoukovitch qui venait de refuser de signer un accord d’association avec l’Union européenne (UE) au moment où il devait aboutir après des années de négociations [2]. Le mouvement s’amplifie rapidement, le pouvoir essaie de chasser les manifestants mais la répression policière ne fait que renforcer leur nombre. La violence monte d’un cran le 30 novembre : 86 personnes sont blessées, certaines grièvement, mais il ne s’agit pas encore d’une contre-insurrection armée. Le nombre de manifestants atteint plusieurs centaines de milliers le 1er décembre (400 000 à 800 000). D’autres villes d’Ukraine se soulèvent à leur tour (Lviv, Kharkiv, etc.). Les manifestants commencent à organiser un service de défense, de secours aux blessés et de recherche des disparus. Malgré les assassinats (au moins deux en janvier), l’intimidation par les titushki (des voyous embauchés et armés par les autorités), le gouvernement ne parvient pas à déloger les manifestants. Les opérations sont de de plus en plus violentes. 91 personnes sont tuées par balles entre le 18 et le 20 février. Parmi elles, 78 manifestants et 13 policiers. Au total, plus de 100 manifestants et 13 policiers et soldats ont été tués entre décembre et février. La police et les forces armées ont installé des snipers sur les toits d’immeubles, et les défenseurs du Maïdan ont fait de même avec des armes saisies sur les policiers. Le massacre le plus épouvantable a eu lieu le 20 février sur l’avenue Institutska : 48 manifestants tués par balles, 157 blessés.
La rumeur selon laquelle certains manifestants auraient été tués par des snipers « fascistes » – comprendre : liés au mouvement Euromaïdan – a été immédiatement lancée par les médias officiels russes, et relayée par des pseudos-antifascistes à tendance conspirationniste. Elle n’a aucun fondement concret, mais pouvait être accréditée par défaut, du fait de la confusion propre aux combats en milieu urbain, où il n’y a pas de ligne de front et où l’origine des tirs n’est pas toujours claire. C’est typiquement le genre de zones d’ombre dans lesquelles s’engouffrent les complotistes et les négationnistes de tout poil, en ignorant sciemment la masse d’indices contraires.
Or, il est établi aujourd’hui sans l’ombre d’un doute :
1) que le président Ianoukovitch a donné personnellement l’ordre d’utiliser des armes contre les manifestants ;
2) que la majorité des tirs sont le fait de « l’unité noire » des Berkout, qui ont utilisé des kalachnikov et des fusils de précision ;
3) que les snipers ont obéi aux responsables des forces de l’ordre.
Enfin, une expertise a permis d’établir avec précision l’origine des tirs mortels et même, dans certains cas, l’identité des tireurs, grâce à la reconstitution en 3D de la trajectoire des projectiles à partir des autopsies et des nombreux documents vidéo existants. Cette expertise exclut sans le moindre doute que les snipers du côté Euromaïdan, dont on connaît la position au moment des violences, aient pu être les auteurs de ces tirs mortels.
Le déclencheur de la révolution est connu : il s’agit du refus par le président Ianoukovitch de signer, en novembre 2013, un accord d’association avec l’UE négocié et attendu depuis 2007. Cet acte marquait la soumission de Ianoukovitch à Poutine et le retour de l’Ukraine sous hégémonie russe. Mais pour les manifestants de Maïdan, il s’agissait aussi de protester contre l’évolution quasi dictatoriale du régime – Ianoukovitch venait de faire passer une réforme constitutionnelle lui donnant à peu près les pleins pouvoirs – et contre la corruption et le pillage mafieux du pays par le clan Ianoukovitch. Après sa fuite, au lendemain de la tuerie du 20 février 2014, on découvrira dans son palais de Mejgorié aux environs de Kiev une accumulation invraisemblable de trésors de toutes natures : animaux exotiques, plomberie en or, lustre en cristal estimé à une valeur de 1,8 millions d’euros, etc., dignes d’un dictateur d’opérette (la résidence est depuis un musée ouvert aux visiteurs).
Les activistes du Maïdan étaient en majorité des jeunes CSP+. Ils représentaient des organisations et des sensibilités très diverses, de l’extrême gauche aux nationalistes radicaux, en passant par des militants LGBT, des activistes religieux, des patrons de PME, le Mejlis (organisation des Tatars de Crimée), des anciens combattants (vétérans de la guerre d’Afghanistan), mais aussi des Juifs soviétiques revenus en Ukraine après avoir émigré en Israël où ils avaient fait leur service militaire. Ces deux derniers groupes ont joué un rôle particulier dans l’auto-défense du Maïdan. Les uns étaient nationalistes, les autres pro-Européens, et la plupart les deux à la fois. « Nous méritons les valeurs européennes » clamaient les manifestants du Maïdan. Ce qui voulait dire : « nous ne voulons plus vivre comme des Soviétiques, dans la peur et la corruption ». L’une des premières victimes de la fusillade du 20 février s’appelait Joseph Schilling, un ouvrier maçon de 61 ans venu de l’ouest de l’Ukraine. Il était juif.
Les partis d’extrême-droite qui ont excité le pseudo-antifascisme, Svoboda et Pravy Sektor, ne constituaient qu’une très petite fraction des activistes du Maïdan. Au demeurant, ils ne peuvent pas être seulement assimilés à des groupuscules « fascistes » ou « néo-nazis » – qui sont tous, par-dessus le marché, viscéralement anti-ukrainiens et des soutiens zélés de Vladimir Poutine [3]. Le Parti Svoboda, créé en 1991, a été proche du Front national (FN) à ses débuts puis a rompu ce compagnonnage en raison des liens du FN et de la famille Le Pen avec le Kremlin et avec les ultra-nationalistes russes comme Vladimir Jirinovski, eux d’authentiques fascistes. Il y a en Ukraine, comme partout, des groupuscules fascistes et des nazillons, mais ils jouaient alors et jouent aujourd’hui encore un rôle marginal, sous leurs propres étiquettes, parfois après s’être fait exclure de ces organisations nationalistes. Le « nationalisme » en Ukraine doit être apprécié à la lumière de la situation post-coloniale d’un pays récemment sorti de 70 ans de domination soviétique (et auparavant russe et austro-hongroise). Il n’est pas de même nature que le souverainisme xénophobe et anti-européen d’Europe occidentale (RN, DLF et Siel en France, AfD en Allemagne, Lega en Italie, etc.).
L’extrême droite ukrainienne a cette particularité d’être profondément divisée entre des nationalistes patriotes, autrefois anti-soviétiques et aujourd’hui anti-Poutine, et des militants animés par la haine de l’Europe et de la démocratie, soutenus par le Kremlin, et qui appartiennent le plus souvent aux réseaux de l’extrême droite européenne, comme l’Alliance européenne des mouvements nationaux (AEMN) créée par le mouvement hongrois Jobbik, ou l’Alliance pour la Paix et la Liberté de Roberto Fiore (Forza Nuova), qui comprend notamment Aube Dorée et le NPD allemand (néo-nazis). Ce clivage traverse aussi bien les mouvements insérés dans la politique parlementaire comme Svoboda et Pravy Sektor que les groupuscules paramilitaires. Svoboda et C14, un groupuscule néo-nazi, se prétendent ultra-nationalistes tout en entretenant des liens troubles avec le Kremlin et avec des mouvements européens ouvertement anti-ukrainiens et proches de Moscou.
Cette ambiguïté – c’est un euphémisme – n’est pas pour rien dans l’effondrement électoral de Svoboda en 2014 après son succès éphémère en 2012. Son président, Oleh Tyahnybok, fort de son statut de leader d’un parti d’opposition important, s’était affiché sur la scène du Maïdan aux côtés des partis démocratiques et de visiteurs étrangers prestigieux comme John McCain venu soutenir la révolution. Mais cela n’a pas empêché sa quasi disparition du paysage politique : à l’élection présidentielle de mai 2014, qui a suivi la révolution, Svoboda ne recueille que 1,16% des suffrages ; aux élections législatives d’octobre 2014, il tombe de 11% en 2012, à 4,72%. Avec les 1,8% de Pravy Sektor, l’extrême droite n’a plus que 7 sièges au Parlement sur 450. Aux élections législatives de 2012, Svoboda avait obtenu un succès spectaculaire, passant de 0 à 37 sièges, car il était apparu à beaucoup d’Ukrainiens comme le seul parti véritablement opposé au Parti des régions de Viktor Ianoukovitch… jusqu’à ce qu’on découvre des connections financières et politiques entre les deux partis.
La même ambiguïté est exacerbée dans les groupuscules paramilitaires où coexistent des volontaires revenus du Donbass déçus des atermoiements de Petro Porochenko (selon eux) dans la conduite de la guerre contre la Russie, et des néo-nazis pro-russes farouchement anti-ukrainiens. La confusion mentale, l’antisémitisme et le goût de la violence qui les réunissent les empêchent aussi d’avoir la moindre influence politique.
Chouard parle d’un « gouvernement nazi », puis de « deux ministres nazis ». Il ne donne pas de noms mais il vise sans doute Andriy Parubiy et Oleksandr Tourtchynov, premier président de l’Ukraine pendant la période de transition (février-juin 2014) et ministre de la défense depuis décembre 2014. À moins qu’il ne s’agisse d’Ihor Tenioukh, membre de Svoboda, chef d’état-major de la marine de 2006 à 2010 et éphémère ministre de la défense dans le premier gouvernement de l’après Ianoukovitch, dirigé par Arseni Iatseniouk, dont il démissionne en mars 2014 après l’invasion de la Crimée par les troupes russes.
Après avoir été le principal responsable du service d’auto-défense du Maïdan, Andriy Parubiy a été secrétaire du Conseil de sécurité nationale de février jusqu’à août 2014, date à laquelle il démissionne. Député depuis 2007, il est président du Parlement (la Rada) depuis avril 2016, succédant à Volodymyr Hroïsman devenu Premier ministre.
Dans l’URSS des années 80, Andriy Parubiy était un activiste indépendantiste : il avait été arrêté à 17 ans (en 1988) pour avoir participé à un rassemblement illégal pour l’indépendance de l’Ukraine – il était alors strictement interdit de s’exprimer en faveur d'une indépendance. En 1991, à l’indépendance de l’Ukraine, il a fait partie des principaux cofondateurs, avec Oleh Tyahnybok, d’un parti indépendantiste de type néonazi, le « Parti social-nationaliste d’Ukraine » dont l'emblème (la Wolfsangel), directement issu de la symbolique hitlérienne, fut abandonné en 2003. Ce parti conclut des accords avec des partis d’extrême droite en Europe, dont le FN de Jean-Marie Le Pen.
Mais avec la révolution orange de 2004, lorsque son ancien parti prend le nom de « Svoboda » (Union panukrainienne Liberté), il le quitte définitivement et devient résolument pro-européen. Il a 33 ans. Huit ans plus tard, il est élu sous la bannière du parti de Ioulia Tymochenko, « La Patrie ». Puis, aux élections législatives de 2014, il est élu député du « Front populaire », le parti d’Arseni Iatseniouk, le premier Premier ministre de Petro Porochenko. Andriy Parubiy a le triste privilège d’être l’objet d’un procès insistant en nazification alimenté par Sputnik et Russia Today. Jean-Luc Mélenchon twittait par exemple en juin 2018 : « Demain de Rugy reçoit solennellement le néonazi antisémite ukrainien Svoboda ! (sic) Voilà où mène l'atlantisme forcené. » On lui attribue notamment un éloge de Hitler. Or il s’agit d’un faux, basé sur la déformation d’une interview, publiée en mai 2018 à l’occasion d’un débat sur la place du référendum dans la Constitution. Tout en déclarant qu’il est favorable à la démocratie directe, Parubiy souligne qu’il faut être prudent et responsable dans l’institution du référendum car la manipulation de la démocratie directe a été un instrument-clé de la prise de pouvoir par Hitler en Allemagne. Allusion historiquement exacte aux plébiscites à répétition (novembre 1933, février 1934, février 1936) organisés par Hitler après sa victoire aux élections de janvier 1933 et qui lui servirent à asseoir sa dictature et à démanteler les institutions parlementaires [4]. Si Parubiy ne s’est jamais exprimé sur Svoboda depuis 2014, en particulier sur les sorties antisémites régulières de son président Oleh Tyahnybok, on n’a pas trouvé la moindre trace de déclarations antisémites de Parubiy, même dans ses écrits et déclarations de jeunesse, quand il était ultra-nationaliste, bien qu’ils soient scrutés à la loupe par le site d’extrême-gauche ukrainien Commons, ou par le Kharkiv Human Rights Protection Group, la principale agence indépendante dédiée à l’information sur les droits de l’homme en Ukraine.
Quant à Tourtchynov qui, lui, n’a jamais été membre de Svoboda ni d’aucun mouvement extrémiste (à l’exception du PCUS, dont il fut membre de 1988 à 1991), en dehors du fait qu’il a dirigé un laboratoire de recherche sur l’économie souterraine (1994-1998), qu’il a soutenu activement dès le début de la guerre dans le Donbass les volontaires qui combattent aux côtés de l’armée régulière, qu’il est baptiste et s'est distingué une fois par des propos homophobes [5], rien ne le qualifie comme « nazi ».
Selon Chouard, Victoria Nuland, assistante du secrétaire d'État américain pour l'Europe et l'Eurasie pendant la présidence Obama, se serait félicitée que les États-Unis aient donné 5 milliards de dollars pour financer le « coup d’état » du Maïdan. Victoria Nuland est la bête noire de la propagande russe et des complotistes pro-russes, de gauche et de droite, parce qu’elle était présente à Kiev au moment du Maïdan, qu’elle est connue pour son franc-parler, qu’elle s’est montrée distribuant des croissants aux manifestants et qu’elle a plaidé la cause de la révolution ukrainienne auprès du Département d’État et d’un président proverbialement frileux. Pour autant, les États-Unis n’ont pas financé l’Euromaïdan. Ils ont en revanche accordé une aide de 1 milliard de dollars d’aide militaire à l’Ukraine au lendemain de la révolution, après que la Russie a envahi la Crimée et déclenché la guerre dans le Donbass.
Les déclarations d’Etienne Chouard n’ont même pas le mérite de l’originalité puisqu’il ne s’agit que d’un copier-coller fidèle d’éléments de langage diffusés par la propagande russe dès 2013, pendant l’Euromaïdan, et ressassés depuis avec constance, malgré l’absence de preuves et d’innombrables réfutations. Comment exprimer la prégnance de ce discours ?
La force du mensonge russe sur la révolution ukrainienne en dépit de ses invraisemblances repose sur son inscription dans le récit de la Grande Guerre patriotique : ce qui se passe en Ukraine ne serait que la reproduction de la lutte contre le fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale. La Russie et les séparatistes du Donbass rejouent, littéralement, le combat héroïque contre la barbarie nazie. Ce cadrage fantasmatique a un grand pouvoir de séduction, d’enrôlement même. Or il repose sur une double supercherie. Premièrement, la situation présente n’a rien à voir avec la Seconde Guerre mondiale. Deuxièmement, le grand récit soviétique, repris tel quel par la Russie de Poutine est lui-même une falsification de l’histoire : dans ce récit, la guerre de 1941-1945 (oui vous avez bien lu, exit les deux ans d’alliance soviéto-nazie de 1939 à juin 1941) n’est pas une guerre mondiale mais l’agression de l’Allemagne contre la seule URSS, qui aurait été la seule à vaincre le fascisme, les Alliés n’ayant fait que de la figuration. D’où ce qu’on pourrait appeler l’antifascisme tautologique :
Ce pseudo-antifascisme a longtemps faussé la culture politique de gauche. Il imprègne encore une partie de l’extrême-gauche européenne, aveugle à la dynamique rouge-brune entretenue par le Kremlin.
Notes :
[1] Sans être contredit, Etienne Chouard affirme : « Qu'est-ce qui s'est passé à Maïdan, en Ukraine ? Tu as des gens armés, des snipers, qui étaient sur les immeubles, qui tiraient sur les flics et qui tiraient sur les manifestants, qui tiraient sur tout le monde pour que soit renversé un gouvernement élu ? Et à la place, on a mis un gouvernement nazi – ouvertement nazi, hein ! En Ukraine, c'est un gouvernement nazi. Il y a deux ministres qui font le salut hitlérien. C'est des vrais nazis. Et c'est financé. […] Victoria Nuland, a avoué ! […] Elle a dit : "On a bien fait de mettre ces 5 milliards de dollars". Donc les États Unis ont financé ce renversement, ce coup d'Etat. […] Enfin, je me trompe peut-être parce que j'y suis pas... J'y suis pas, et vraiment, je me trompe peut-être. Mais enfin, tu me demandes... ».
[2] Né à Kaboul en 1981, Mustapha Nayyem est l’une des principales figures du Maïdan qui sont entrés en politique après la révolution. Elu à la Rada en 2014 sur une liste de soutien à Petro Porochenko, il rejoint le petit parti d’opposition Alliance Démocratique et se consacre essentiellement à la lutte contre la corruption.
[3] Des militants d’extrême-droite se sont engagés dans le Donbass aux côtés des séparatistes pro-russes dès 2014. D’après une enquête de StreetPress de 2016, ils seraient une quarantaine, parmi lesquels des militants de Troisième voie, le groupuscule de Serge Ayoub, de L’Unité Continentale (franco-serbe), le vétéran Erwan Castel. Tantôt volontaires, tantôt mercenaires, ces troupes ont reçu des renforts « civils » de journalistes et de personnalités politiques, lors des simulacres d’élections organisées en 2014 et en 2018. En novembre 2018, les élections générales dans les républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk ont bénéficié d’un contingent d’observateurs internationaux de 26 pays ou pseudo-pays (12 pays européens, mais aussi la Turquie, l’Abkhazie et l’Ossétie du sud (territoires géorgiens annexés par la Russie depuis 2008), la Palestine, le Congo, l’Irak, le Brésil, le Chili, etc.). On y trouve beaucoup de représentants de la nébuleuse rouge-brun, mais aussi des partis de gouvernement comme Die Linke et AfD pour l’Allemagne, Forza Italia. Particularité française, une forte représentation des Républicains (5) qui ont côtoyé sans problèmes les identitaires Mikola Provic, Julien Rochedy ou l’expert militaire Xavier Moreau, habitué de RT et du site d’Alain Soral Égalité & Réconciliation.
[4] Voir l’analyse de Halya Coniash, assortie de la transcription complète de l’interview en anglais.
[5] En août 2007, Tourtchynov a été épinglé par l’ONG britannique The Lesbian and Gay Foundation pour avoir déclaré : « Si un homme a des conceptions normales, vous l’étiquetez comme conservateur, mais ceux qui consomment des drogues et font la promotion de la sodomie, vous les qualifiez de progressistes. Toutes ces choses sont des perversions ».
Les auteurs :
Hélène Roudier de Lara est professeur agrégée de philosophie.
Philippe de Lara est politiste, maître de conférences à l'université Paris 2 Panthéon Assas.
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