L'activiste suprémaciste noir passé de l'entourage de Dieudonné au panafricanisme et l'animateur de radio sur RFI ont scellé leurs retrouvailles par un communiqué conjoint.
Dans un communiqué publié mardi 6 février 2018 sur leurs comptes Facebook respectifs, Kemi Seba et Claudy Siar ont annoncé leur réconciliation :
« Malgré nos différences méthodologiques (collaborer avec Macron ou pas au moment où une jeunesse africaine exprime une volonté de rupture), nous vous informons que le conflit qui nous a opposés ces derniers jours est terminé. [...] Nous affirmons ici qu’il n’y a ni raciste, ni traître parmi nous. [...] Nous nous serrons la main fraternellement. Chacun empruntera la voie qu’il aura choisie. »
Qui sont les deux signataires de ce communiqué ?
Figure de la complosphère antisémite, le Franco-Béninois Kemi Seba, de son vrai nom Stellio Capo Chichi, a défrayé la chronique judiciaire avec des condamnations pour violences en réunion, outrage à agent, contestation de crime contre l’humanité et incitation à la haine raciale. Voyant la main des Etats-Unis derrière l'organisation djihadiste Boko Haram, Seba est le fondateur d'un groupuscule suprémaciste noir, la Tribu Ka, dissous par décret du 26 juillet 2006 après qu'il a organisé une marche d’intimidation dans le quartier juif de la rue des Rosiers, à Paris. Il a animé l'éphémère Mouvement des damnés de l’impérialisme (MDI) qui s'était signalé pour ses positions contre le métissage et l’intégration et militait pour un « seul idéal : la désionisation » (sic), tout en s'adressant aux « personnes désireuses de mettre un terme à l'hégémonie des impérialistes (axe américano-sioniste, ILLUMINATI, et autres groupes occultes impérialistes) ». Longtemps proche de Dieudonné M’Bala M’Bala, cet adepte des coups d'éclat médiatiques se proclame désormais « ethno-différentialiste » et « panafricaniste ». Il est parvenu à s'imposer comme l'un des visages de la contestation contre le franc CFA en Afrique francophone.
Seba n’a de cesse de dénoncer « la dictature de l'oligarchie occidentale », ainsi qu’il l’a encore récemment fait lorsqu’il a été reçu, en décembre dernier, par l’ultra-nationaliste russe Alexandre Douguine. Suite à cette rencontre, le média gouvernemental russe Sputnik, n’a pas manqué d’interviewer longuement celui que se dit admirateur de Vladimir Poutine, Mouammar Kadhafi et René Guénon – un auteur particulièrement prisé de l’extrême droite.
Quant à Claudy Siar, il est surtout connu pour son activité d’animateur sur... RFI (Radio France Internationale). Il y présente depuis 1995 « Couleurs tropicales », que la chaîne définit comme « l'émission des musiques afro » et qui a fait de cet originaire de la Guadeloupe une célébrité en Afrique et aux Antilles. Il a également fondé la radio Tropiques FM, « née pour mettre en exergue les spécificités culturelles et identitaires des Français d’outre-mer », selon les termes utilisés sur son compte Facebook.
Homme de radio, de télévision et aussi ancien chanteur, souvent considéré comme un humaniste défendant la cause noire, Claudy Siar a été nommé en mars 2011 au poste de délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d’Outre-mer. Cette nomination avait provoqué quelques remous, Le Canard enchaîné ayant alors exhumé d’anciennes déclarations de soutien à Dieudonné (après son fameux sketch lors de son passage sur le plateau de Marc-Olivier Fogiel en 2003) et à la Tribu Ka (« On a un extrémisme qui résulte du rejet constant de nos populations dans notre propre pays. À un moment donné, il est normal que les gens se radicalisent. [...] Je ne jetterai jamais la pierre à la Tribu Ka, par exemple, même si je ne suis pas d'accord avec certains de leurs propos »). Claudy Siar avait néanmoins conservé son poste jusqu’en mai 2012.
Le compagnonnage entre celui qui se pose en champion du « souverainisme africain » et la vedette de l'émission musicale de RFI n'est pas nouveau comme en témoignent divers posts de Claudy Siar sur son compte Facebook :
Jusqu'à cette déclaration de soutien dénuée d'ambiguïté concernant la croisade anti-franc CFA entamée par l'ancien activiste suprémaciste :
« Au-delà des avis personnels, des envies égocentriques, tous les militants intègres doivent reconnaître que Kemi Seba a désormais le leadership pour mener à bien la mission qu'il a choisi. [...] Son action ouvrira une nouvelle ère de la conscience panafricaine ».
Expression d’un engagement plus clair encore, Claudy Siar participait, le 11 février 2017, à Villeneuve-la-Garenne, en banlieue parisienne, à un meeting initié par Kemi Seba et son association « Urgences panfricanistes ». L’affiche de l’événement annonçait également la présence de Toussaint Alain, un proche de Laurent Gbagbo, l’ancien président ivoirien actuellement poursuivi et détenu par la Cour pénale internationale où il est accusé d'avoir voulu, en 2010-2011, « conserver le pouvoir par tous les moyens, y compris par l'emploi de la force contre des civils ». On notera que les vidéos du meeting ont été publiées sur YouTube par le site conspirationniste Le Cercle des Volontaires.
La brouille entre Kemi Seba et Claudy Siar était née du fait que l’animateur de « Couleurs tropicales » avait accepté d’accompagner le président Macron à Dakar à l’occasion de la 3ème conférence de financement du Partenariat mondial pour l'éducation (1er et 2 février 2018), ce qui ne pouvait que déplaire à l’agitateur d’extrême droite. Claudy Siar, lui, s’en était félicité dans un tweet et un post sur Facebook qui semblent avoir été supprimés depuis... un effet de la réconciliation entre les deux hommes ?
Toujours est-il que, invité mercredi 7 février de l’émission de Frédéric Taddeï, « Europe 1 Social Club », Siar a dénoncé « les accords de décolonisation » en Afrique francophone qui ont, selon lui, « piégé ces pays-là ». Des propos que ne renierait sans doute pas Kemi Seba. Comme le dit le communiqué de réconciliation, entre eux, les différences ne sont que « méthodologiques ».
L'activiste suprémaciste noir passé de l'entourage de Dieudonné au panafricanisme et l'animateur de radio sur RFI ont scellé leurs retrouvailles par un communiqué conjoint.
« Malgré nos différences méthodologiques (collaborer avec Macron ou pas au moment où une jeunesse africaine exprime une volonté de rupture), nous vous informons que le conflit qui nous a opposés ces derniers jours est terminé. [...] Nous affirmons ici qu’il n’y a ni raciste, ni traître parmi nous. [...] Nous nous serrons la main fraternellement. Chacun empruntera la voie qu’il aura choisie. »
Qui sont les deux signataires de ce communiqué ?
Figure de la complosphère antisémite, le Franco-Béninois Kemi Seba, de son vrai nom Stellio Capo Chichi, a défrayé la chronique judiciaire avec des condamnations pour violences en réunion, outrage à agent, contestation de crime contre l’humanité et incitation à la haine raciale. Voyant la main des Etats-Unis derrière l'organisation djihadiste Boko Haram, Seba est le fondateur d'un groupuscule suprémaciste noir, la Tribu Ka, dissous par décret du 26 juillet 2006 après qu'il a organisé une marche d’intimidation dans le quartier juif de la rue des Rosiers, à Paris. Il a animé l'éphémère Mouvement des damnés de l’impérialisme (MDI) qui s'était signalé pour ses positions contre le métissage et l’intégration et militait pour un « seul idéal : la désionisation » (sic), tout en s'adressant aux « personnes désireuses de mettre un terme à l'hégémonie des impérialistes (axe américano-sioniste, ILLUMINATI, et autres groupes occultes impérialistes) ». Longtemps proche de Dieudonné M’Bala M’Bala, cet adepte des coups d'éclat médiatiques se proclame désormais « ethno-différentialiste » et « panafricaniste ». Il est parvenu à s'imposer comme l'un des visages de la contestation contre le franc CFA en Afrique francophone.
Seba n’a de cesse de dénoncer « la dictature de l'oligarchie occidentale », ainsi qu’il l’a encore récemment fait lorsqu’il a été reçu, en décembre dernier, par l’ultra-nationaliste russe Alexandre Douguine. Suite à cette rencontre, le média gouvernemental russe Sputnik, n’a pas manqué d’interviewer longuement celui que se dit admirateur de Vladimir Poutine, Mouammar Kadhafi et René Guénon – un auteur particulièrement prisé de l’extrême droite.
Quant à Claudy Siar, il est surtout connu pour son activité d’animateur sur... RFI (Radio France Internationale). Il y présente depuis 1995 « Couleurs tropicales », que la chaîne définit comme « l'émission des musiques afro » et qui a fait de cet originaire de la Guadeloupe une célébrité en Afrique et aux Antilles. Il a également fondé la radio Tropiques FM, « née pour mettre en exergue les spécificités culturelles et identitaires des Français d’outre-mer », selon les termes utilisés sur son compte Facebook.
Homme de radio, de télévision et aussi ancien chanteur, souvent considéré comme un humaniste défendant la cause noire, Claudy Siar a été nommé en mars 2011 au poste de délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d’Outre-mer. Cette nomination avait provoqué quelques remous, Le Canard enchaîné ayant alors exhumé d’anciennes déclarations de soutien à Dieudonné (après son fameux sketch lors de son passage sur le plateau de Marc-Olivier Fogiel en 2003) et à la Tribu Ka (« On a un extrémisme qui résulte du rejet constant de nos populations dans notre propre pays. À un moment donné, il est normal que les gens se radicalisent. [...] Je ne jetterai jamais la pierre à la Tribu Ka, par exemple, même si je ne suis pas d'accord avec certains de leurs propos »). Claudy Siar avait néanmoins conservé son poste jusqu’en mai 2012.
Le compagnonnage entre celui qui se pose en champion du « souverainisme africain » et la vedette de l'émission musicale de RFI n'est pas nouveau comme en témoignent divers posts de Claudy Siar sur son compte Facebook :
Jusqu'à cette déclaration de soutien dénuée d'ambiguïté concernant la croisade anti-franc CFA entamée par l'ancien activiste suprémaciste :
« Au-delà des avis personnels, des envies égocentriques, tous les militants intègres doivent reconnaître que Kemi Seba a désormais le leadership pour mener à bien la mission qu'il a choisi. [...] Son action ouvrira une nouvelle ère de la conscience panafricaine ».
Expression d’un engagement plus clair encore, Claudy Siar participait, le 11 février 2017, à Villeneuve-la-Garenne, en banlieue parisienne, à un meeting initié par Kemi Seba et son association « Urgences panfricanistes ». L’affiche de l’événement annonçait également la présence de Toussaint Alain, un proche de Laurent Gbagbo, l’ancien président ivoirien actuellement poursuivi et détenu par la Cour pénale internationale où il est accusé d'avoir voulu, en 2010-2011, « conserver le pouvoir par tous les moyens, y compris par l'emploi de la force contre des civils ». On notera que les vidéos du meeting ont été publiées sur YouTube par le site conspirationniste Le Cercle des Volontaires.
La brouille entre Kemi Seba et Claudy Siar était née du fait que l’animateur de « Couleurs tropicales » avait accepté d’accompagner le président Macron à Dakar à l’occasion de la 3ème conférence de financement du Partenariat mondial pour l'éducation (1er et 2 février 2018), ce qui ne pouvait que déplaire à l’agitateur d’extrême droite. Claudy Siar, lui, s’en était félicité dans un tweet et un post sur Facebook qui semblent avoir été supprimés depuis... un effet de la réconciliation entre les deux hommes ?
Toujours est-il que, invité mercredi 7 février de l’émission de Frédéric Taddeï, « Europe 1 Social Club », Siar a dénoncé « les accords de décolonisation » en Afrique francophone qui ont, selon lui, « piégé ces pays-là ». Des propos que ne renierait sans doute pas Kemi Seba. Comme le dit le communiqué de réconciliation, entre eux, les différences ne sont que « méthodologiques ».
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