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Vincent Reynouard condamné à 12 mois de prison en semi-liberté

Publié par Perla Msika20 mars 2025, ,

Condamné pour « contestation de crime contre l’humanité » et « provocation publique à la haine », le négationniste, actuellement domicilié chez le directeur du journal antisémite Rivarol, devra dormir en prison pendant un an. Si sa peine est confirmée...

Vincent Reynouard (montage CW).

Le négationniste Vincent Reynouard a été condamné ce mercredi 19 mars à une peine d’un an de semi-liberté et à un total de 23 000 euros de dommages-intérêts et frais de justice aux associations plaignantes. Une peine qui accable les nombreux soutiens venus assister à son procès le 22 janvier dernier pour « contestation de crime contre l’humanité », « contestation de crime de guerre » et « provocation publique à la haine, à la discrimination ou à la violence ». Vincent Reynouard a naturellement la possibilité de faire appel de cette décision.

Conspiracy Watch était présent à l’audience du mercredi 22 janvier. Ce jour-là, la salle est pleine à craquer. Au dehors, on attend encore par dizaines. Reynouard est venu avec son fan-club : des ados et des vieillards, en treillis, en béret ou en velours côtelé. Presque toujours des hommes. Sur les bancs de la 17ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris, l’extrême droite française a de nombreux visages. Pour Vincent Reynouard, un énième procès pour négationnisme (sa première condamnation date de 1992). Pour eux, un rendez-vous à ne pas manquer.

Face au prévenu, quatre associations se sont constituées parties civiles : la Licra, l’Organisation juive européenne (OJE), l’Observatoire Juif de France (OJF) et le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA). Dans ce procès-fleuve, la liste des propos jugés est aussi interminable qu’abjecte. En multirécidiviste du négationnisme, Vincent Reynouard a fait sa mue sur les réseaux sociaux et sur un blog. Il y publie des vidéos dans lesquelles il nie, encore et toujours, la réalité de la Shoah (« Jamais les Allemands n’ont planifié ni perpétré une extermination de masse »), l’existence des chambres à gaz (une « impossibilité physique et chimique » selon lui) et les circonstances du massacre d’Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944 par une division Waffen-SS.

« Condamnez-moi. Je ne me tairai pas pour autant »

« On a affaire au négationnisme le plus crasse. Celui qui réhabilite Hitler, qui se revendique du national-socialisme, celui qui compte les morts dans les chambres à gaz » indique Me Galina Elbaz, avocate de la Licra. Pour Reynouard, apologiste exalté du nazisme et d’Adolf Hitler, l’Histoire « officielle », « racontée par les vainqueurs », diabolise injustement le Troisième Reich. En bon faussaire de l’Histoire, ce professeur de mathématiques révoqué de l’Education nationale en 1997 tente de faire entrer sa thèse dans le cadre d’un débat historiographique « légitime ».

Cette audience, Vincent Reynouard s’en sert d’ailleurs comme « d’une tribune » plaide Me Corinne Matouk, avocate de l’OJE. De quoi exciter les passions tristes de son comité de soutien, rameuté pour l’occasion. Dans la salle, on aperçoit l’ex-« Gilet jaune constituant » passé du mélenchonisme au royalisme Thibault Devienne. On reconnaît également Jérôme Bourbon, directeur du journal antisémite Rivarol (auquel Reynouard collabore). Lui aussi condamné pour négationnisme, il hébergerait Reynouard actuellement selon les déclarations du prévenu.

Devant ses partisans, ce dernier persiste et signe : « Je suis révisionniste. Je ne cherche aucune excuse […]. J’ai fait de la prison et je suis prêt à y retourner s’il le faut […]. Condamnez-moi. Je ne me tairai pas pour autant ». Depuis son procès, Vincent Reynouard continue de publier des vidéos négationnistes et complotistes sur ses réseaux sociaux. Avec toujours la même rengaine : dénoncer la « dictature juive de la pensée » et la Shoah comme une « tromperie ».

À la barre, arborant l’air déterminé de celui qui est convaincu que l’Histoire l’absoudra, Reynouard a prétendu avoir « le courage de ses idées ». C’était sans oublier sa fuite pendant près de dix ans en Angleterre puis en Ecosse où il s’est caché sous une fausse identité pour, de son propre aveu, « échapper à la justice française ».

Mais en 2020, les outrances de ses propres soutiens provoquent son extradition. La profanation du centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane d’un tag « Reynouard a raison » remet l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité et les crimes de haine (OCLCH) au travail. Retrouvé puis extradé, Vincent Reynouard a comparu pour trois affaires, dont une a été renvoyée au 28 mai prochain, à la demande de son conseil, Me Pierre-Marie Bonneau.

« Judéo-indifférent »

S’il assume son négationnisme, Vincent Reynouard s’est défendu d’être antisémite. Il se dit d’ailleurs « judéo-indifférent ». Le terme interpelle la Cour. Pourquoi les Juifs tiennent-ils alors une place aussi importante dans sa vie ? « Pour un sujet qui vous laisse indifférent, je dois dire que je suis un peu perplexe » remarque la présidente. Le prévenu insiste. Pour lui, la question des Juifs est « accidentelle », même si, d’après cet historien autoproclamé, « il pouvait y avoir des raisons (vraies ou fausses) à l'antisémitisme dans les années 1930 ». Du reste, ce père de neuf enfants affirme avoir des amis juifs. « Quand j’étais à Londres, j’ai donné des cours à de nombreuses familles juives dont une élève qui m’a remercié »

« Judéo-indifférent » : le terme fait aussi tiquer les parties civiles et le procureur. Dans sa plaidoirie, l’avocat de l’OJE, Me Oudy Bloch, contre-attaque : « Le négationnisme chez Monsieur Reynouard, c’est plus quun hobby, c’est un combat. C’est de lantisémitisme chimiquement pur ». Le procureur ironise : « Je ne connais pas de nazi philosémite ». Il avait alors requis, pour l’ensemble des affaires, 18 mois de prison et 10 000 euros d’amende.

De son côté, l’avocat du prévenu, Me Pierre-Marie Bonneau, signe la thèse de son client, teintée d’un relativisme douteux : « Vincent Reynouard est tout sauf un antisémite. Il ne veut pas blesser les victimes juives… ou les victimes non-juives de la Seconde Guerre mondiale ». Pour celui qui, aux dernières élections européennes, a emmené la liste néo-fasciste « Forteresse Europe », ce qui se joue, c’est la remise en cause de la loi Gayssot réprimant le négationnisme. Ainsi, pas question de juger des déclarations « à l’aune d’associations ou d’une communauté quelles qu’elles soient ». Qu’importe que les propos récurrents de son client tombent toujours sous le coup de la loi – Gayssot, donc.

À l’issue du procès, Vincent Reynouard est attendu par une foule d’hommes – ses soutiens, restés jusqu’au bout. Certains le filment. Tous le suivent fidèlement en file indienne vers la sortie du Palais de Justice. Le prévenu, lui, affiche une mine satisfaite. Et pour cause : « Monsieur Reynouard a gouté le parfum capiteux du paria, et du persécuté, puisque la prison ne lui fait pas peur, conclut le procureur. On se reverra » présage-t-il finalement. Réponse de l’intéressé : « Avec plaisir ! »

 

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Vincent Reynouard (montage CW).

Le négationniste Vincent Reynouard a été condamné ce mercredi 19 mars à une peine d’un an de semi-liberté et à un total de 23 000 euros de dommages-intérêts et frais de justice aux associations plaignantes. Une peine qui accable les nombreux soutiens venus assister à son procès le 22 janvier dernier pour « contestation de crime contre l’humanité », « contestation de crime de guerre » et « provocation publique à la haine, à la discrimination ou à la violence ». Vincent Reynouard a naturellement la possibilité de faire appel de cette décision.

Conspiracy Watch était présent à l’audience du mercredi 22 janvier. Ce jour-là, la salle est pleine à craquer. Au dehors, on attend encore par dizaines. Reynouard est venu avec son fan-club : des ados et des vieillards, en treillis, en béret ou en velours côtelé. Presque toujours des hommes. Sur les bancs de la 17ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris, l’extrême droite française a de nombreux visages. Pour Vincent Reynouard, un énième procès pour négationnisme (sa première condamnation date de 1992). Pour eux, un rendez-vous à ne pas manquer.

Face au prévenu, quatre associations se sont constituées parties civiles : la Licra, l’Organisation juive européenne (OJE), l’Observatoire Juif de France (OJF) et le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA). Dans ce procès-fleuve, la liste des propos jugés est aussi interminable qu’abjecte. En multirécidiviste du négationnisme, Vincent Reynouard a fait sa mue sur les réseaux sociaux et sur un blog. Il y publie des vidéos dans lesquelles il nie, encore et toujours, la réalité de la Shoah (« Jamais les Allemands n’ont planifié ni perpétré une extermination de masse »), l’existence des chambres à gaz (une « impossibilité physique et chimique » selon lui) et les circonstances du massacre d’Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944 par une division Waffen-SS.

« Condamnez-moi. Je ne me tairai pas pour autant »

« On a affaire au négationnisme le plus crasse. Celui qui réhabilite Hitler, qui se revendique du national-socialisme, celui qui compte les morts dans les chambres à gaz » indique Me Galina Elbaz, avocate de la Licra. Pour Reynouard, apologiste exalté du nazisme et d’Adolf Hitler, l’Histoire « officielle », « racontée par les vainqueurs », diabolise injustement le Troisième Reich. En bon faussaire de l’Histoire, ce professeur de mathématiques révoqué de l’Education nationale en 1997 tente de faire entrer sa thèse dans le cadre d’un débat historiographique « légitime ».

Cette audience, Vincent Reynouard s’en sert d’ailleurs comme « d’une tribune » plaide Me Corinne Matouk, avocate de l’OJE. De quoi exciter les passions tristes de son comité de soutien, rameuté pour l’occasion. Dans la salle, on aperçoit l’ex-« Gilet jaune constituant » passé du mélenchonisme au royalisme Thibault Devienne. On reconnaît également Jérôme Bourbon, directeur du journal antisémite Rivarol (auquel Reynouard collabore). Lui aussi condamné pour négationnisme, il hébergerait Reynouard actuellement selon les déclarations du prévenu.

Devant ses partisans, ce dernier persiste et signe : « Je suis révisionniste. Je ne cherche aucune excuse […]. J’ai fait de la prison et je suis prêt à y retourner s’il le faut […]. Condamnez-moi. Je ne me tairai pas pour autant ». Depuis son procès, Vincent Reynouard continue de publier des vidéos négationnistes et complotistes sur ses réseaux sociaux. Avec toujours la même rengaine : dénoncer la « dictature juive de la pensée » et la Shoah comme une « tromperie ».

À la barre, arborant l’air déterminé de celui qui est convaincu que l’Histoire l’absoudra, Reynouard a prétendu avoir « le courage de ses idées ». C’était sans oublier sa fuite pendant près de dix ans en Angleterre puis en Ecosse où il s’est caché sous une fausse identité pour, de son propre aveu, « échapper à la justice française ».

Mais en 2020, les outrances de ses propres soutiens provoquent son extradition. La profanation du centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane d’un tag « Reynouard a raison » remet l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité et les crimes de haine (OCLCH) au travail. Retrouvé puis extradé, Vincent Reynouard a comparu pour trois affaires, dont une a été renvoyée au 28 mai prochain, à la demande de son conseil, Me Pierre-Marie Bonneau.

« Judéo-indifférent »

S’il assume son négationnisme, Vincent Reynouard s’est défendu d’être antisémite. Il se dit d’ailleurs « judéo-indifférent ». Le terme interpelle la Cour. Pourquoi les Juifs tiennent-ils alors une place aussi importante dans sa vie ? « Pour un sujet qui vous laisse indifférent, je dois dire que je suis un peu perplexe » remarque la présidente. Le prévenu insiste. Pour lui, la question des Juifs est « accidentelle », même si, d’après cet historien autoproclamé, « il pouvait y avoir des raisons (vraies ou fausses) à l'antisémitisme dans les années 1930 ». Du reste, ce père de neuf enfants affirme avoir des amis juifs. « Quand j’étais à Londres, j’ai donné des cours à de nombreuses familles juives dont une élève qui m’a remercié »

« Judéo-indifférent » : le terme fait aussi tiquer les parties civiles et le procureur. Dans sa plaidoirie, l’avocat de l’OJE, Me Oudy Bloch, contre-attaque : « Le négationnisme chez Monsieur Reynouard, c’est plus quun hobby, c’est un combat. C’est de lantisémitisme chimiquement pur ». Le procureur ironise : « Je ne connais pas de nazi philosémite ». Il avait alors requis, pour l’ensemble des affaires, 18 mois de prison et 10 000 euros d’amende.

De son côté, l’avocat du prévenu, Me Pierre-Marie Bonneau, signe la thèse de son client, teintée d’un relativisme douteux : « Vincent Reynouard est tout sauf un antisémite. Il ne veut pas blesser les victimes juives… ou les victimes non-juives de la Seconde Guerre mondiale ». Pour celui qui, aux dernières élections européennes, a emmené la liste néo-fasciste « Forteresse Europe », ce qui se joue, c’est la remise en cause de la loi Gayssot réprimant le négationnisme. Ainsi, pas question de juger des déclarations « à l’aune d’associations ou d’une communauté quelles qu’elles soient ». Qu’importe que les propos récurrents de son client tombent toujours sous le coup de la loi – Gayssot, donc.

À l’issue du procès, Vincent Reynouard est attendu par une foule d’hommes – ses soutiens, restés jusqu’au bout. Certains le filment. Tous le suivent fidèlement en file indienne vers la sortie du Palais de Justice. Le prévenu, lui, affiche une mine satisfaite. Et pour cause : « Monsieur Reynouard a gouté le parfum capiteux du paria, et du persécuté, puisque la prison ne lui fait pas peur, conclut le procureur. On se reverra » présage-t-il finalement. Réponse de l’intéressé : « Avec plaisir ! »

 

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à propos de l'auteur
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Perla Msika
Fondatrice de La Perle, web media d'actualité artistique et culturelle, Perla Msika est journaliste. Passée par RFI, parfois sur BFM, elle écrit dans Elle, dans Franc-Tireur et dans Conspiracy Watch.
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