L’actu de la semaine décryptée par Conspiracy Watch (du 08/03/2025 au 14/03/2025).
XENIA FEDOROVA. De CNews à e Front Populaire (média souverainiste lancé en 2020 par Michel Onfray et Stéphane Simon − ndlr) en passant par l'émission d'Éric Morillot sur la web TV d'extrême droite TV Libertés, elle est la nouvelle coqueluche des médias du groupe Bolloré et de la sphère conspirationniste. Son nom : Xenia Fedorova. Devenue l'égérie des propagandistes russes en France, l'ancienne présidente de RT France enchaîne les chroniques sur CNews, signe des tribunes dans Le JDD et publie chez Fayard un livre intitulé Bannie, sous-titré « Liberté d’expression sous condition ». Un ouvrage où elle dépeint RT France comme une victime de la censure occidentale, tout en se posant en défenseuse de la liberté d’expression. Pour elle, « il n’y a aucun exemple de propagande, parce que RT France n’a jamais diffusé de fausse nouvelle ou de propagande […]. Nous avons été l’un des premiers médias à donner du temps au professeur Raoult ». Le groupe Bolloré ne lésine pas sur la promotion puisqu'elle était invitée chez Pascal Praud qui a donné lecture d'un passage de son livre dans lequel elle attaque « NewsGuard, Wikipedia [et] Conspiracy Watch, décrits comme « un petit monde qui vit en vase clos, s’autogénère, s’alimente [...] fait la pluie et le beau temps […], partage les mêmes opinions » [archive].
Une posture qui tranche avec les témoignages de plusieurs anciens salariés de RT France. Comme celui-ci, qui témoigne au micro de France Info : « Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, nous avons reçu des consignes claires : nous devions parler d’"opération spéciale", rien d’autre ». Auteur de Russia Today (RT) : un média d’influence au service de l’État russe, l’expert Maxime Audinet décrit quant à lui Fedorova comme une « figure de la post-vérité, qui épouse entièrement la rhétorique du Kremlin ». RT France avait d'ailleurs intenté un procès en diffamation contre lui et son éditeur pour lequel ils ont été relaxés (sources : Julien Pain/X, 10 mars 2025 ; Tristan Mendès France/X, 10mars 2025 ; Le Monde, 8 mars 2025 ; Victor Mottin/X, 11 mars 2025).
RADIO MOSCOU. Et si le JDD et CNews étaient les nouveaux Russia Today en France ? Les médias de Vincent Bolloré défendent désormais ouvertement la Russie de Vladimir Poutine. Les invités de la chaîne reprennent presque mot pour mot les demandes de Moscou : une Ukraine démilitarisée qui doit servir de zone tampon entre l’Est et l’Ouest. À l'instar du JDD, CNews a recruté des « journalistes » affiliés à la chaîne russe tels qu’Igor Kurashenko, Antoine Cléraux ou encore Xenia Fedorova. Philippe de Villiers, chroniqueur vedette de CNews explique sur Europe 1 que, s’il devenait président, Cyril Hanouna « ser(ait) son J. D. Vance ». Il déroule aussi dans Le JDD la thèse conspirationniste qu'il avait déjà exposée dans un ouvrage il y a quelques années : l’Union européenne serait une pure création des États-Unis (sources : Cartes du Monde/X, 12 mars 2025 ; Le Monde, 8 mars 2025).
FACT-CHECKING. Le fact-checking sert-il à quelque chose ? Dans un thread, Julien Pain tente de répondre. « Ceux qui dénoncent l'absence de liberté d'expression en France, ceux qui se disent brimés, ce sont les mêmes qui ensuite tentent de vous faire taire […]. Alors pourquoi les fact checkers sont aussi attaqués ? Parce que nous sommes effectivement en première ligne contre l'expansion [du] technofascisme. Nous tentons de ramener de la rationalité, des faits, de la science dans le débat public. Et cela semble aujourd'hui inacceptable […]. Nous sommes la cible de ceux qui veulent que leurs opinions ne soient plus contredites par les faits » souligne le journaliste. Par exemple, cette semaine, le directeur de Conspiracy Watch, Rudy Reichstadt a été ciblé par des propos mensongers tenus sur le média complotiste d'extrême droite Tocsin. Cette lutte contre les fake news engendre des dégâts colossaux pour certaines personnes qui sont la cible d'attaque diffamatoires, mensongères et coordonnées. Ainsi, Antoine Daoust, créateur et ancien animateur du média Fact & Furious, cible d'une violente campagne de cyberharcèlement par la complosphère et un premier procès qu'il a remporté face au directeur de FranceSoir Xavier Azalbert. Daoust écrit sur son compte X L’officine que son « aventure » se terminait, qu’il quittait les réseaux sociaux avec sa compagne. En cause ? Justement, « les attaques de la complosphère (qui les) ont profondément affectés, (les) épuisant bien au-delà de ce (qu’ils pouvaient) imaginer » (sources : Julien Pain/X, 11 mars 2025 ; L'officine, 11 mars 2025 ; Rudy Reichstadt/X, 12 mars 2025).
DÉSINFORMATION PRO-RUSSE. 20 Minutes revient sur une publication publiée sur les réseaux sociaux, insinuant que les armoiries de l’Ukraine seraient à l’origine une référence démoniaque, qui a été visionnée plus d’un million de fois sur les réseaux sociaux. En réalité, le trident présent sur les armoiries de l’Ukraine est un vieux symbole utilisé par une dynastie qui a régné sur le pays à l’époque médiévale. Pour ce qui est de « Moloch », le nom que l’on peut lire sur le visuel conspirationniste, il fait référence à une divinité citée dans la Bible, liée au sacrifice d’enfants. Cette figure a par la suite été utilisée pour désigner un démon. La fourche a pu être utilisée comme symbole en lien avec le satanisme, mais il n’existe pas de lien direct avec l’histoire des armoiries ukrainiennes. La publication fait également référence à une théorie du complot antisémite qui instrumentalise l’histoire des Khazars... (sources : 20 Minutes, 8 mars 2025).
ROUMANIE. Dans notre dernière newsletter, nous évoquions certains alliés proche de l'extrême droite et de la complosphère, des personnes clefs de la phalange que Călin Georgescu cherche à mobiliser pour s'emparer de la Roumanie. Celui-ci ne pourra pas se présenter à l’élection présidentielle comme il l’ambitionnait. Sa candidature a été invalidée par le Bureau électoral central et la Cour constitutionnelle de son pays. En cause ? Des soupçons d'ingérence russe. Parmi les conspirationnistes qui s'insurgent contre cette décision figure en bonne place Silvano Trotta qui considère que « nous vivons dans une dictature contrôlée depuis Bruxelles » [archive]. Mais qui est vraiment Călin Georgescu ? Réponse en moins de 3 minutes par Perla Msika (source : Conspiracy Watch/TikTok, 12 mars 2025).
@conspiracywatch Il est le nouveau martyr de l'extrême droite complotiste. Călin Georgescu a vu sa candidature rejetée pour la prochaine élection présidentielle roumaine. En cause, des soupçons d'ingérence russe. Mais qui est-il vraiment ? La mise au point de Perla Msika. Georgescu Roumanie ingérence
RASSEMBLEMENT NATIONAL. Entre relativisme et complotisme. Certains membres du Rassemblement national (RN) profitent de la guerre en Ukraine et des tensions avec la Russie pour reprocher à Emmanuel Macron de « jouer les va-t-en-guerre » en exagérant la « menace russe ». Certains élus vont jusqu’à parler de déloyauté d’un chef de l’État plus soucieux de faire avancer un prétendu calendrier européen que français. « Macron se rêve en président d’une future fédération européenne, a écrit, le 2 mars sur X, Hervé de Lépinau, député RN du Vaucluse. Il fait en sorte d’affaiblir la France pour que son intégration dans un État fédéral soit la seule alternative proposée aux Français. Il est l’ennemi des intérêts nationaux » (archive). Une rengaine complotiste, souligne le journaliste du Monde Corentin Lesueur rappelant une vieille tradition de l’extrême droite d’insinuer l’obéissance de ses adversaires à des intérêts étrangers, qui infuse jusqu’au sommet du RN. « Je pense qu’[Emmanuel Macron] a un rapport très intrigant à la France et à l’histoire française, a ainsi déclaré Jordan Bardella, le 6 mars sur CNews. On a le sentiment qu’(il) est en France sans être de France ».
Sur un tout autre plan, Jordan Bardella et Marion Maréchal sont invités par le gouvernement israélien à intervenir à la Conférence internationale de la lutte contre l’antisémitisme les 26 et 27 mars prochains. Depuis les années Marine Le Pen, le RN se présente comme « le meilleur bouclier » des Français juifs même si certains de ses candidats ou représentants, comme Bruno Gollnisch ou Frédéric Boccaletti n'ont jamais été désavoués par leur parti (sources : Le Monde, 12 mars 2025 ; Valérie Igounet/X, 10 juillet 2024).
EMILIE GOMIS. L'ex-basketteuse Emilie Gomis (exclue de l’organisation des JO Paris 2024 pour ses propos légitimant le massacre du 7-Octobre) est visée depuis l'année dernière par une enquête pour apologie du terrorisme. Selon elle, c'est « l'axe Américano Sioniste » qui est derrière le terrorisme islamiste « pour nuire aux musulmans dans le monde ». Sa source ? Un complotiste américain d'extrême droite du nom de Richard Black. Sur son compte X (plus de 52 000 abonnés), Emilie Gomis a aussi récemment sondé ses followers avec la proposition suivante : « Les soutiens et complices des génocidaires sionistes, n'ont pour seule patrie que leur porte monnaie » (sic) (source : Conspiracy Watch/X, 12 mars 2025).
FLORIAN PHILIPPOT. Le 8 mars, Florian Philippot organisait à Paris une manifestation « pour la paix » qui regroupait quelques centaines d'individus malgré ses dénégations sur l'ampleur de cette manifestation [archive]. Sur le podium se trouvaient le président du parti Les Patriotes ; l'avocat Fabrice Di Vizio ; un représentant du Cercle Aristote qui, dans son discours, a effectué un parallèle entre le Covid-19 et l’Ukraine (« On voudrait faire mourir nos enfants. Après avoir voulu les faire mourir en leur donnant un vaccin qui n'était pas nécesssaire pour eux, on veut maintenant les envoyer mourir pour la commission européenne de Mme von der Leyen ») et la chroniqueuse Myriam Palomba (source : Tristan Mendès France/X, 8 mars 2025).
ÉGALITÉ & RÉCONCILIATION. Le 8 mars, Égalité & Réconciliation annonce sur X qu’après « la suppression il y a quelques semaines de (sa) chaîne Youtube École Révolutionnaire, voici que (sa) chaîne principale Résistance et Réinformation vient à son tour d'être supprimée » [archive]. L’explication teintée de conspirationnisme suit dans une des publications du site d’Alain Soral : « Ce n’est un secret pour personne que les deux communautés de pointe dans la république actuelle, malgré ses statuts qui ne reconnaissent aucun intermédiaire entre elle-même et le citoyen, sont la communauté juive et la communauté LGBT […]. Ces deux communautés, qui ont de l’influence sur le Big Tech, font donc la pluie et le beau temps en matière de liberté d’expression » [archive].
NOVLANGUE. Comme l’a révélé le New York Times, l’administration Trump a dressé une liste noire de 200 termes désormais bannis des communications officielles et des sites gouvernementaux. Parmi eux, des mots comme « femme », « sexe », « Noir », « Amérindiens », « LGBT » et « antiracisme ». Dans le même temps, le ministère de la Défense met fin à tous ses financements dans les sciences sociales, stoppant net 91 études en cours sur le changement climatique, l’extrémisme et la désinformation. Un « blitzkrieg lexical » qui, selon Le Monde, vise à remodeler le langage pour aligner la politique américaine sur une idéologie conservatrice radicale. David Colon, historien de la propagande, rappelle que « la manipulation du langage a toujours été une arme politique redoutable, et Trump en donne ici une démonstration éclatante » (sources : Le Monde, 2 mars 2025 ; Bruno Guglielminetti/X, 10 mars 2025 ; David Colon/X, 13 mars 2025).
MUSK. Elon Musk s’engouffre une nouvelle fois dans la brèche complotiste : il suggère, sans apporter la moindre preuve, que l’attaque informatique contre X aurait été orchestrée par l’Ukraine avec l’aide de l’OTAN et de l’Union européenne. Une accusation immédiatement reprise par la propagande pro-russe. Pourtant, comme le rappelle le spécialiste de la désinformation David Colon, « il n’existe à ce stade aucun élément technique permettant d’imputer cette attaque à l’Ukraine » (sources : David Colon/X, 10 mars 2025 ; Random Debunk/X, 11 mars 2025).
HINKLE. Plus c'est gros, plus ça passe. Depuis quelques jours, une énième fake news à propos de Brigitte Macron circule : La France aurait proposé à Candace Owens, un paiement unique de 4 millions de dollars et 50 000 dollars par mois pour le reste de sa vie, si elle cessait de faire des reportages sur Brigitte… [archive]. Contrairement à ce qu'affirme ce post vu plus de 7 millions de fois, la France n'a évidemment pas payé la complotiste Candace Owens. À noter que le post en question provient du compte « Legitimate Targets », qui n'est autre qu'un « média » créé par un propagandiste pro-russe, Jackson Hinkle, qui fait partie des plus grands désinformateurs de X (source : Random Debunk/X, 12 mars 2025).
POUSSARD. Xavier Poussard rapporte qu’un long sujet sur Becoming Brigitte (plus de 5 minutes) a été diffusé le 9 mars dans « Nouvelles de la semaine » (Vesti Nedeli), un journal télévisé de Russie du dimanche soir sur Rossiya 1. Selon l'ex-directeur de Faits & Documents, le journaliste Dmitri Kisselev a opté pour cet angle : « les accents bellicistes d’Emmanuel Macron ne seraient-ils qu’une diversion pour étouffer l’affaire Brigitte ? » [archive]. Géopolitique Profonde (80 000 abonnés sur X) considère que « pendant que l’Élysée détourne le regard, que la presse française esquive le sujet et que les censeurs s’activent en coulisses, les médias russes brisent le tabou. Ce n’est plus un simple sujet de rumeurs sur les réseaux, c’est devenu un enjeu international » [archive]. Ajoutons que les versions anglaise et française de l'ouvrage complotiste de Poussard qui accuse Brigitte Macron de mentir sur son sexe sont toujours en tête des meilleures ventes de livres sur Amazon.
BELGIQUE. Le 11 mars, Herman Brusselmans a été acquitté par le tribunal correctionnel de Gand de toute violation des lois contre le racisme et le négationnisme après une chronique publiée dans l'hebdomadaire Humo dans laquelle il avait écrit qu'à la vue d'une photo d'un enfant palestinien en détresse à Gaza, il voulait « enfoncer un couteau pointu dans la gorge de chaque juif (qu'il) rencontre ». Des associations avaient porté plainte contre lui. La justice belge a estimé qu'il était question de liberté d'expression et qu'il n'apparait pas qu'il ait eu l'intention, par sa chronique, « d'inciter à la haine ou à la violence contre la communauté juive ou de nier l'Holocauste ». Dans un texte antérieur, Brusselmans avait soutenu qu'aux États-Unis, « les grandes entreprises, les grandes banques, les services secrets, les sociétés immobilières et la quasi-totalité de la culture sont détenus par des Israéliens »... (sources : La Libre Belgique, 11 mars 2025 ; Conspiracy Watch Global, 16 août 2024).
LES DÉCONSPIRATEURS. Tristan Mendès France, Rudy Reichstadt et David Medioni décryptent l’actualité « complotiste » dans cette 58ème émission intitulée « La complosphère au service de Poutine ». Au programme : Gene Hackman et l'affaire Epstein ; Robert F. Kennedy Jr et la rougeole ; Un moment maccarthyste ? ; La nomination de Kingsley Wilson au Pentagone ; Comment la propagande russe trouve des relais en France ; NewsGuard, Wikipédia et Conspiracy Watch pris à partie par Xenia Fedorova ; Notre enquête sur le média Tocsin ; La manifestation des Patriotes « pour la paix » ; Le nationaliste Călin Georgescu exclu de l'élection présidentielle roumaine ; L'obsession Soros ; Le dernier Complorama sur le complotisme autour de la papauté... (source : Conspiracy Watch, 11 mars 2025).
XENIA FEDOROVA. De CNews à e Front Populaire (média souverainiste lancé en 2020 par Michel Onfray et Stéphane Simon − ndlr) en passant par l'émission d'Éric Morillot sur la web TV d'extrême droite TV Libertés, elle est la nouvelle coqueluche des médias du groupe Bolloré et de la sphère conspirationniste. Son nom : Xenia Fedorova. Devenue l'égérie des propagandistes russes en France, l'ancienne présidente de RT France enchaîne les chroniques sur CNews, signe des tribunes dans Le JDD et publie chez Fayard un livre intitulé Bannie, sous-titré « Liberté d’expression sous condition ». Un ouvrage où elle dépeint RT France comme une victime de la censure occidentale, tout en se posant en défenseuse de la liberté d’expression. Pour elle, « il n’y a aucun exemple de propagande, parce que RT France n’a jamais diffusé de fausse nouvelle ou de propagande […]. Nous avons été l’un des premiers médias à donner du temps au professeur Raoult ». Le groupe Bolloré ne lésine pas sur la promotion puisqu'elle était invitée chez Pascal Praud qui a donné lecture d'un passage de son livre dans lequel elle attaque « NewsGuard, Wikipedia [et] Conspiracy Watch, décrits comme « un petit monde qui vit en vase clos, s’autogénère, s’alimente [...] fait la pluie et le beau temps […], partage les mêmes opinions » [archive].
Une posture qui tranche avec les témoignages de plusieurs anciens salariés de RT France. Comme celui-ci, qui témoigne au micro de France Info : « Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, nous avons reçu des consignes claires : nous devions parler d’"opération spéciale", rien d’autre ». Auteur de Russia Today (RT) : un média d’influence au service de l’État russe, l’expert Maxime Audinet décrit quant à lui Fedorova comme une « figure de la post-vérité, qui épouse entièrement la rhétorique du Kremlin ». RT France avait d'ailleurs intenté un procès en diffamation contre lui et son éditeur pour lequel ils ont été relaxés (sources : Julien Pain/X, 10 mars 2025 ; Tristan Mendès France/X, 10mars 2025 ; Le Monde, 8 mars 2025 ; Victor Mottin/X, 11 mars 2025).
RADIO MOSCOU. Et si le JDD et CNews étaient les nouveaux Russia Today en France ? Les médias de Vincent Bolloré défendent désormais ouvertement la Russie de Vladimir Poutine. Les invités de la chaîne reprennent presque mot pour mot les demandes de Moscou : une Ukraine démilitarisée qui doit servir de zone tampon entre l’Est et l’Ouest. À l'instar du JDD, CNews a recruté des « journalistes » affiliés à la chaîne russe tels qu’Igor Kurashenko, Antoine Cléraux ou encore Xenia Fedorova. Philippe de Villiers, chroniqueur vedette de CNews explique sur Europe 1 que, s’il devenait président, Cyril Hanouna « ser(ait) son J. D. Vance ». Il déroule aussi dans Le JDD la thèse conspirationniste qu'il avait déjà exposée dans un ouvrage il y a quelques années : l’Union européenne serait une pure création des États-Unis (sources : Cartes du Monde/X, 12 mars 2025 ; Le Monde, 8 mars 2025).
FACT-CHECKING. Le fact-checking sert-il à quelque chose ? Dans un thread, Julien Pain tente de répondre. « Ceux qui dénoncent l'absence de liberté d'expression en France, ceux qui se disent brimés, ce sont les mêmes qui ensuite tentent de vous faire taire […]. Alors pourquoi les fact checkers sont aussi attaqués ? Parce que nous sommes effectivement en première ligne contre l'expansion [du] technofascisme. Nous tentons de ramener de la rationalité, des faits, de la science dans le débat public. Et cela semble aujourd'hui inacceptable […]. Nous sommes la cible de ceux qui veulent que leurs opinions ne soient plus contredites par les faits » souligne le journaliste. Par exemple, cette semaine, le directeur de Conspiracy Watch, Rudy Reichstadt a été ciblé par des propos mensongers tenus sur le média complotiste d'extrême droite Tocsin. Cette lutte contre les fake news engendre des dégâts colossaux pour certaines personnes qui sont la cible d'attaque diffamatoires, mensongères et coordonnées. Ainsi, Antoine Daoust, créateur et ancien animateur du média Fact & Furious, cible d'une violente campagne de cyberharcèlement par la complosphère et un premier procès qu'il a remporté face au directeur de FranceSoir Xavier Azalbert. Daoust écrit sur son compte X L’officine que son « aventure » se terminait, qu’il quittait les réseaux sociaux avec sa compagne. En cause ? Justement, « les attaques de la complosphère (qui les) ont profondément affectés, (les) épuisant bien au-delà de ce (qu’ils pouvaient) imaginer » (sources : Julien Pain/X, 11 mars 2025 ; L'officine, 11 mars 2025 ; Rudy Reichstadt/X, 12 mars 2025).
DÉSINFORMATION PRO-RUSSE. 20 Minutes revient sur une publication publiée sur les réseaux sociaux, insinuant que les armoiries de l’Ukraine seraient à l’origine une référence démoniaque, qui a été visionnée plus d’un million de fois sur les réseaux sociaux. En réalité, le trident présent sur les armoiries de l’Ukraine est un vieux symbole utilisé par une dynastie qui a régné sur le pays à l’époque médiévale. Pour ce qui est de « Moloch », le nom que l’on peut lire sur le visuel conspirationniste, il fait référence à une divinité citée dans la Bible, liée au sacrifice d’enfants. Cette figure a par la suite été utilisée pour désigner un démon. La fourche a pu être utilisée comme symbole en lien avec le satanisme, mais il n’existe pas de lien direct avec l’histoire des armoiries ukrainiennes. La publication fait également référence à une théorie du complot antisémite qui instrumentalise l’histoire des Khazars... (sources : 20 Minutes, 8 mars 2025).
ROUMANIE. Dans notre dernière newsletter, nous évoquions certains alliés proche de l'extrême droite et de la complosphère, des personnes clefs de la phalange que Călin Georgescu cherche à mobiliser pour s'emparer de la Roumanie. Celui-ci ne pourra pas se présenter à l’élection présidentielle comme il l’ambitionnait. Sa candidature a été invalidée par le Bureau électoral central et la Cour constitutionnelle de son pays. En cause ? Des soupçons d'ingérence russe. Parmi les conspirationnistes qui s'insurgent contre cette décision figure en bonne place Silvano Trotta qui considère que « nous vivons dans une dictature contrôlée depuis Bruxelles » [archive]. Mais qui est vraiment Călin Georgescu ? Réponse en moins de 3 minutes par Perla Msika (source : Conspiracy Watch/TikTok, 12 mars 2025).
@conspiracywatch Il est le nouveau martyr de l'extrême droite complotiste. Călin Georgescu a vu sa candidature rejetée pour la prochaine élection présidentielle roumaine. En cause, des soupçons d'ingérence russe. Mais qui est-il vraiment ? La mise au point de Perla Msika. Georgescu Roumanie ingérence
RASSEMBLEMENT NATIONAL. Entre relativisme et complotisme. Certains membres du Rassemblement national (RN) profitent de la guerre en Ukraine et des tensions avec la Russie pour reprocher à Emmanuel Macron de « jouer les va-t-en-guerre » en exagérant la « menace russe ». Certains élus vont jusqu’à parler de déloyauté d’un chef de l’État plus soucieux de faire avancer un prétendu calendrier européen que français. « Macron se rêve en président d’une future fédération européenne, a écrit, le 2 mars sur X, Hervé de Lépinau, député RN du Vaucluse. Il fait en sorte d’affaiblir la France pour que son intégration dans un État fédéral soit la seule alternative proposée aux Français. Il est l’ennemi des intérêts nationaux » (archive). Une rengaine complotiste, souligne le journaliste du Monde Corentin Lesueur rappelant une vieille tradition de l’extrême droite d’insinuer l’obéissance de ses adversaires à des intérêts étrangers, qui infuse jusqu’au sommet du RN. « Je pense qu’[Emmanuel Macron] a un rapport très intrigant à la France et à l’histoire française, a ainsi déclaré Jordan Bardella, le 6 mars sur CNews. On a le sentiment qu’(il) est en France sans être de France ».
Sur un tout autre plan, Jordan Bardella et Marion Maréchal sont invités par le gouvernement israélien à intervenir à la Conférence internationale de la lutte contre l’antisémitisme les 26 et 27 mars prochains. Depuis les années Marine Le Pen, le RN se présente comme « le meilleur bouclier » des Français juifs même si certains de ses candidats ou représentants, comme Bruno Gollnisch ou Frédéric Boccaletti n'ont jamais été désavoués par leur parti (sources : Le Monde, 12 mars 2025 ; Valérie Igounet/X, 10 juillet 2024).
EMILIE GOMIS. L'ex-basketteuse Emilie Gomis (exclue de l’organisation des JO Paris 2024 pour ses propos légitimant le massacre du 7-Octobre) est visée depuis l'année dernière par une enquête pour apologie du terrorisme. Selon elle, c'est « l'axe Américano Sioniste » qui est derrière le terrorisme islamiste « pour nuire aux musulmans dans le monde ». Sa source ? Un complotiste américain d'extrême droite du nom de Richard Black. Sur son compte X (plus de 52 000 abonnés), Emilie Gomis a aussi récemment sondé ses followers avec la proposition suivante : « Les soutiens et complices des génocidaires sionistes, n'ont pour seule patrie que leur porte monnaie » (sic) (source : Conspiracy Watch/X, 12 mars 2025).
FLORIAN PHILIPPOT. Le 8 mars, Florian Philippot organisait à Paris une manifestation « pour la paix » qui regroupait quelques centaines d'individus malgré ses dénégations sur l'ampleur de cette manifestation [archive]. Sur le podium se trouvaient le président du parti Les Patriotes ; l'avocat Fabrice Di Vizio ; un représentant du Cercle Aristote qui, dans son discours, a effectué un parallèle entre le Covid-19 et l’Ukraine (« On voudrait faire mourir nos enfants. Après avoir voulu les faire mourir en leur donnant un vaccin qui n'était pas nécesssaire pour eux, on veut maintenant les envoyer mourir pour la commission européenne de Mme von der Leyen ») et la chroniqueuse Myriam Palomba (source : Tristan Mendès France/X, 8 mars 2025).
ÉGALITÉ & RÉCONCILIATION. Le 8 mars, Égalité & Réconciliation annonce sur X qu’après « la suppression il y a quelques semaines de (sa) chaîne Youtube École Révolutionnaire, voici que (sa) chaîne principale Résistance et Réinformation vient à son tour d'être supprimée » [archive]. L’explication teintée de conspirationnisme suit dans une des publications du site d’Alain Soral : « Ce n’est un secret pour personne que les deux communautés de pointe dans la république actuelle, malgré ses statuts qui ne reconnaissent aucun intermédiaire entre elle-même et le citoyen, sont la communauté juive et la communauté LGBT […]. Ces deux communautés, qui ont de l’influence sur le Big Tech, font donc la pluie et le beau temps en matière de liberté d’expression » [archive].
NOVLANGUE. Comme l’a révélé le New York Times, l’administration Trump a dressé une liste noire de 200 termes désormais bannis des communications officielles et des sites gouvernementaux. Parmi eux, des mots comme « femme », « sexe », « Noir », « Amérindiens », « LGBT » et « antiracisme ». Dans le même temps, le ministère de la Défense met fin à tous ses financements dans les sciences sociales, stoppant net 91 études en cours sur le changement climatique, l’extrémisme et la désinformation. Un « blitzkrieg lexical » qui, selon Le Monde, vise à remodeler le langage pour aligner la politique américaine sur une idéologie conservatrice radicale. David Colon, historien de la propagande, rappelle que « la manipulation du langage a toujours été une arme politique redoutable, et Trump en donne ici une démonstration éclatante » (sources : Le Monde, 2 mars 2025 ; Bruno Guglielminetti/X, 10 mars 2025 ; David Colon/X, 13 mars 2025).
MUSK. Elon Musk s’engouffre une nouvelle fois dans la brèche complotiste : il suggère, sans apporter la moindre preuve, que l’attaque informatique contre X aurait été orchestrée par l’Ukraine avec l’aide de l’OTAN et de l’Union européenne. Une accusation immédiatement reprise par la propagande pro-russe. Pourtant, comme le rappelle le spécialiste de la désinformation David Colon, « il n’existe à ce stade aucun élément technique permettant d’imputer cette attaque à l’Ukraine » (sources : David Colon/X, 10 mars 2025 ; Random Debunk/X, 11 mars 2025).
HINKLE. Plus c'est gros, plus ça passe. Depuis quelques jours, une énième fake news à propos de Brigitte Macron circule : La France aurait proposé à Candace Owens, un paiement unique de 4 millions de dollars et 50 000 dollars par mois pour le reste de sa vie, si elle cessait de faire des reportages sur Brigitte… [archive]. Contrairement à ce qu'affirme ce post vu plus de 7 millions de fois, la France n'a évidemment pas payé la complotiste Candace Owens. À noter que le post en question provient du compte « Legitimate Targets », qui n'est autre qu'un « média » créé par un propagandiste pro-russe, Jackson Hinkle, qui fait partie des plus grands désinformateurs de X (source : Random Debunk/X, 12 mars 2025).
POUSSARD. Xavier Poussard rapporte qu’un long sujet sur Becoming Brigitte (plus de 5 minutes) a été diffusé le 9 mars dans « Nouvelles de la semaine » (Vesti Nedeli), un journal télévisé de Russie du dimanche soir sur Rossiya 1. Selon l'ex-directeur de Faits & Documents, le journaliste Dmitri Kisselev a opté pour cet angle : « les accents bellicistes d’Emmanuel Macron ne seraient-ils qu’une diversion pour étouffer l’affaire Brigitte ? » [archive]. Géopolitique Profonde (80 000 abonnés sur X) considère que « pendant que l’Élysée détourne le regard, que la presse française esquive le sujet et que les censeurs s’activent en coulisses, les médias russes brisent le tabou. Ce n’est plus un simple sujet de rumeurs sur les réseaux, c’est devenu un enjeu international » [archive]. Ajoutons que les versions anglaise et française de l'ouvrage complotiste de Poussard qui accuse Brigitte Macron de mentir sur son sexe sont toujours en tête des meilleures ventes de livres sur Amazon.
BELGIQUE. Le 11 mars, Herman Brusselmans a été acquitté par le tribunal correctionnel de Gand de toute violation des lois contre le racisme et le négationnisme après une chronique publiée dans l'hebdomadaire Humo dans laquelle il avait écrit qu'à la vue d'une photo d'un enfant palestinien en détresse à Gaza, il voulait « enfoncer un couteau pointu dans la gorge de chaque juif (qu'il) rencontre ». Des associations avaient porté plainte contre lui. La justice belge a estimé qu'il était question de liberté d'expression et qu'il n'apparait pas qu'il ait eu l'intention, par sa chronique, « d'inciter à la haine ou à la violence contre la communauté juive ou de nier l'Holocauste ». Dans un texte antérieur, Brusselmans avait soutenu qu'aux États-Unis, « les grandes entreprises, les grandes banques, les services secrets, les sociétés immobilières et la quasi-totalité de la culture sont détenus par des Israéliens »... (sources : La Libre Belgique, 11 mars 2025 ; Conspiracy Watch Global, 16 août 2024).
LES DÉCONSPIRATEURS. Tristan Mendès France, Rudy Reichstadt et David Medioni décryptent l’actualité « complotiste » dans cette 58ème émission intitulée « La complosphère au service de Poutine ». Au programme : Gene Hackman et l'affaire Epstein ; Robert F. Kennedy Jr et la rougeole ; Un moment maccarthyste ? ; La nomination de Kingsley Wilson au Pentagone ; Comment la propagande russe trouve des relais en France ; NewsGuard, Wikipédia et Conspiracy Watch pris à partie par Xenia Fedorova ; Notre enquête sur le média Tocsin ; La manifestation des Patriotes « pour la paix » ; Le nationaliste Călin Georgescu exclu de l'élection présidentielle roumaine ; L'obsession Soros ; Le dernier Complorama sur le complotisme autour de la papauté... (source : Conspiracy Watch, 11 mars 2025).
Depuis dix-sept ans, Conspiracy Watch contribue à sensibiliser aux dangers du complotisme en assurant un travail d’information et de veille critique sans équivalent. Pour pérenniser nos activités, le soutien de nos lecteurs est indispensable. Â